18e DIMANCHE Du Temps Ordinaire (B)

1 août 2021

  • Frère Marie-Jean BONNET Frère Marie-Jean BONNET

Introduction (Frère Jean-François) : Nous venons de chanter et d’honorer le Seigneur, le Seigneur Jésus, le Vrai Pain du Ciel, le Pain Vivant, la Vraie Lumière, le Bon Pasteur, la Résurrection et la Vie. En ce dimanche, ravivons en nous le désir de l’Eucharistie. Aujourd’hui nous faisons mémoire de Saint Alphonse-Marie de Liguori, un grand apôtre de l’Eucharistie et de la Vierge Marie, fondateur des Rédemptoristes, une congrégation religieuse.

Entrons dans cette Eucharistie avec un sentiment de reconnaissance et d’action de grâce pour le don de Dieu dans notre vie et pour notre vie éternelle. Reconnaissons-nous pauvres et pécheurs en accueillant le pardon et l’amour de Dieu.

 

Homélie (Frère Marie-Jean) : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole venant de la bouche de Dieu » (Matthieu 4,4). Je ne me suis pas trompé d’Évangile. Cette parole du Deutéronome, que nous connaissons bien, que Jésus répond au Tentateur et que nous entendons chaque année au seuil du Carême. Il me semble que les lectures de ce jour lui font bien écho.

Dans la première lecture de ce jour, le peuple hébreu vient de faire l’expérience de la compassion de Dieu qui l’a sauvé, « à main forte et à bras étendu », comme dit la Bible, sauvé et de l’esclavage et de la poursuite de l’armée de Pharaon. Cependant, malgré ces signes forts de la tendresse de Dieu, de sa Providence, de sa veille sur son Peuple, comme le rappelle le psaume 105 (13-15), les Hébreux « s’empressent d’oublier ce que Dieu a fait, sans attendre de connaître ses desseins. Ils se livrent à leur convoitise dans le désert ; là, ils mettent Dieu à l’épreuve. Et Dieu leur donne ce qu’ils ont réclamé, mais ils trouvent ses dons dérisoires. » Jamais contents. Ça nous dit peut-être quelque chose.

Libérés de l’esclavage extérieur, ils ne sont pas encore libérés de l’esclavage intérieur de leurs passions : et d’abord de la peur, par manque de foi en leur Dieu, en ce Dieu de tendresse et de pitié ; mais aussi de toutes leurs passions de convoitise des biens matériels qu’ils avaient en Égypte. Leur cœur était attaché, comme celui du jeune homme riche, à tout ce qu’ils avaient en abondance : les oignons, l’ail et les poireaux. Et ils commencent à récriminer contre Moïse et contre Dieu.

La ferme exhortation de Saint Paul aux chrétiens d’Ephèse, nous laisse entendre qu’eux aussi sont tentés de regarder en arrière, et de retomber dans le paganisme et l’esclavage de la chair : « Frères, je vous le dis, j’en témoigne dans le Seigneur : vous ne devez plus vous conduire comme les païens qui se laissent guider par le néant de leur pensée… » Quand on pense à certains programmes de télévision, on se dit : voilà, quel néant, quelle folie, quelle nullité. « Il s’agit de vous défaire de votre conduite d’autrefois, c’est-à-dire de l’homme ancien corrompu par les convoitises », on y revient, c’est un mot qui revient souvent dans cette liturgie d’aujourd’hui, « corrompu par les convoitises qui l’entraînent dans l’erreur. Laissez-vous renouveler par la transformation spirituelle de votre pensée. Revêtez-vous de l’homme nouveau, créé, selon Dieu, dans la justice et la sainteté conformes à la vérité. » (Ephésiens. 4, 17.22-24)

Quant à Jésus, il déclare aux foules qui le suivent : « Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle. » Jésus sait que si cette foule l’a recherché et rejoint, c’est par intérêt immédiat : « vous me cherchez, non parce que vous avez vu des signes », ça aurait pu les ouvrir à une soif plus haute, plus profonde, non, « vous me cherchez parce que vous avez mangé de ces pains et que vous avez été rassasiés. » Bien sûr, Jésus a nourri cette foule par compassion, car il a souci et des corps et des âmes. Mais il sait aussi que l’homme s’enferme trop facilement dans son horizon matériel, oubliant que son âme aussi a faim; faim de vérité et de sagesse, faim de paix, faim d’amour, et à travers toutes ces faims, faim de Dieu, même s’il ne le sait pas; car en Lui, Dieu, « Amour et Vérité se rencontrent, Justice et Paix s’embrassent. » (Psaume 84, v.11)

Cette faim-là, qu’habitent toutes ces faims les plus profondes de l’homme, ne peut donc être rassasiée que par Dieu lui-même, qui en Jésus est venu du Ciel pour donner la vie au monde. Et de fait, Jésus affirme et promet : « Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. » Nous savons par expérience, je l’espère, tous et chacun, combien c’est vrai, que le Seigneur seul, que le Seigneur Jésus, quand on l’a rencontré vraiment, personnellement, apaise enfin toutes nos faims. Oh bien sûr, on n’est pas encore pleinement au Ciel. Mais nous avons un avant-goût du Ciel, nous le savons bien. Par la foi, le Christ habite dans nos cœurs. Par la foi, nous sommes avec Lui déjà. Nous sommes au Ciel quand nous sommes dans la foi et quand nous sommes dans la charité, bien sûr, aussi.

Mais voilà… Nous savons bien tout ça. Mais notre cœur ressemble peut-être à ce terrain encombré de ronces, – pour reprendre cette parabole bien connue du semeur, – ce terrain encombré de ronces où la semence de la Parole de Dieu, reçue pourtant chaque dimanche, est étouffée, ou du moins entravée, ensuite, dans la semaine, par les soucis du monde et les séductions de toutes sortes.

Alors ? Comment vais-je répondre cet été à ces faims profondes qui m’habitent ? La semaine dernière nous étions en session avec quinze familles. A l’issue de cette semaine, une personne faisait cette réflexion : « cette semaine, nous avons recréé surtout nos âmes, et maintenant nous allons recréer nos corps. » Sagesse ! Ne pas oublier l’un et l’autre, qui sont l’un et l’autre cadeau de Dieu, mais qui ont besoin d’être restaurés, recréés. D’abord le dimanche, qui est fait pour ça, récréer nos âmes, auprès de Dieu et les uns auprès des autres. Et recréer aussi nos corps, prendre soin de « Frère Âne ».

Et voici le témoignage d’un homme, qui n’est pas soupçonnable d’être un rêveur et encore moins un paresseux, un homme qui a œuvré sans relâche aux périphéries, toute sa vie : « Prendre du temps pour Dieu, c’est gagner des heures inestimables pour les autres. Plus nous sommes engloutis dans la vie active, et plus nous devons devenir un adorateur priant. (…) Si elles faisaient oraison, les personnes stressées – il y en a beaucoup aujourd’hui – arriveraient plus facilement à gérer leur couple, leur profession, leur vie quotidienne. C’est nous-même que la prière change. (…) J’appelle souvent Dieu dans ma journée, en Lui disant simplement que je l’aime : ce n’est pas une prière fatigante. On peut le dire mille fois par jour. Et Lui ne s’en lassera pas. » Des mots du Père Guy Gilbert … (c’est beau) d’avoir cet homme qui est mangé par les autres, sait prendre aussi le temps de se ressourcer, de se recréer avec Dieu.

Et pour terminer, quelques mots de Sainte Teresa de Calcutta : « Nous savons tous, en regardant la croix, à quel point Jésus nous a aimés. Lorsque nous regardons l’Eucharistie, nous savons combien il nous aime maintenant. C’est pourquoi, il s’est fait lui-même « pain de vie » afin de satisfaire notre faim pour son amour. » Pain de vie pour satisfaire notre faim pour son amour, « et puis, comme si ce n’était pas suffisant pour lui, il s’est fait lui-même l’affamé, l’indigent, le sans-abri, afin que vous et moi puissions satisfaire sa faim pour notre amour humain. Car c’est pour cela que nous avons été créés, pour aimer et être aimés. » Amen.