28e Dimanche du Temps Ordinaire (A) 2023

15 octobre 2023

  • Frère Jean François	CROIZÉ Frère Jean François CROIZÉ

INTRODUCTION : Père JEAN-FRANCOIS

Nous venons de chanter le visage de tendresse d’un Dieu d’amour, un visage qui nous relève et qui nous pardonne lorsque nous revenons à Lui. En ce mois d’octobre, le Seigneur nous donne aussi comme visage de tendresse Notre Dame du Rosaire qui a le souci de ses enfants, particulièrement en ces circonstances tragiques que nous vivons dans ces conflits mondiaux.

Demandons au Seigneur, sa Miséricorde, la puissance de son amour pour donner la paix, l’unité, la charité, la fraternité en ce monde qui se refroidit.

Chers frères et sœurs, entrons dans cette célébration du mystère de l’Eucharistie en reconnaissant que nous avons péché.

HOMÉLIE : PÈRE JEAN-FRANCOIS

Chers frères et sœurs, chaque dimanche, le jour du Seigneur est un jour de grâces. Il nous appelle à vivre de sa joie, de son amour. Il nous est rappelé aujourd’hui la volonté du Seigneur qui invite tous les hommes au repas du Seigneur. Force est de constater dans la parabole de l’Évangile que ce sont les pauvres qui répondent mieux à son invitation. Le Seigneur nous invite à l’espérance et à une vraie conversion du cœur.

Dans la première lecture, nous pouvons sentir la situation difficile que traversait le peuple d’Israël. A travers des paroles poétiques, le prophète Isaïe cherche à rassurer son peuple et à lui donner espoir, et le projet que présente le prophète est un projet d’ordre universel. Il annonce une intervention puissante de Dieu pour un monde nouveau, un monde plus uni, plus pacifié où tous les peuples, malgré leurs diversités s’assiéront à la même table. Isaïe annonce un monde dans lequel Dieu fera disparaitre la souffrance et la mort ; il annonce un monde dans lequel le Seigneur Lui-même essuiera les larmes sur les visages et effacera toute humiliation.

En voyant la réalité de nos vies, de nos familles, la réalité de notre monde, de notre pays, pouvons-nous croire à cette prophétie ? Les difficultés, les souffrances, les maladies, la mort, les conflits destructeurs nous assaillent. Nous prions, nous demandons la grâce de Dieu, mais Dieu semble sourd à nos appels. Quand donc viendra ce jour-là où nous pourrons dire : « Voici notre Dieu, en Lui nous espérions, et Il nous a sauvés », selon la prophétie d’Isaïe ?

Dans la deuxième lecture, nous voyons que la vie de St Paul est loin d’être une succession de festins. L’épreuve l’a poursuivi toute sa vie. C’est d’ailleurs de la prison qu’il a écrit cette lettre aux Philippiens. Mais il met tout son espoir dans le Seigneur, car dit-il : « Je peux tout en Celui qui me fortifie. »

Et St Paul nous donne une grande leçon. Il nous invite à être contemplatifs, c’est-à-dire à voir la présence de Dieu dans nos vies à travers nos moments de joie et de peine. Nos malheurs, nos souffrances ne doivent pas nous rendre sourds à son appel. Dieu nous invite toujours à être en communion avec Lui ; Il est venu partager nos peines nos joies.

En annonçant l’Évangile aux chrétiens de Philippe, l’apôtre St Paul a appris à se placer au-delà du dénuement, de la richesse, mais dans des situations difficiles il a recours à des vrais amis. L’apôtre est habitué, par de nombreux voyages missionnaires, à vivre tantôt dans la gêne, tantôt dans l’abondance. Ce point de vue est secondaire pour lui, dont la force est Jésus Christ, à qui il a donné toute sa vie. Mais il a dû tout de même apprécier l’aide des Philippiens, durant son séjour de prison, comme un geste d’affection et de réconfort.

La parabole de l’Évangile nous interpelle sur notre rapport à Dieu et aux autres. A travers son enseignement, Jésus nous invite à devenir plus attentifs à la grâce de Dieu. Dieu y aspire pour nous. C’est la plus belle histoire d’amour. Il veut nous faire partager son bonheur. Dieu décida d’épouser l’humanité pour introduire dans sa famille, dans sa vie, dans son amour, toute l’humanité, et ce fut l’incarnation de son Fils.

Le Royaume des Cieux est comparable à un Roi qui célébrait les noces de son Fils. Oui, Dieu nous donne son Fils Jésus qui se livre par amour. Il nous aime passionnément. Cette image des noces court comme un fil d’or tout au long de la Bible, oui, d’un bout à l’autre de la Révélation, les relations de Dieu avec l’humanité sont une alliance, des épousailles. Quel changement s’opèrerait si le monde en feu se laissait embraser par le feu de l’Esprit-Saint ! Ainsi faut-il comprendre la parole du festin nuptial.

Dans un premier temps, il s’agit d’une invitation à un repas de noces, tout ce qu’il y a de plus joyeux dans la vie des hommes. Tout se préparait, s’annonçait depuis longtemps. Il ne peut y avoir d’excuses pour refuser d’y participer. Car, enfin, celui qui invite est le Roi, le Roi qui célèbre, par un banquet, les noces de son Fils, et l’invitation était pressante et cordiale. Le refus est méprisant, il finira par un meurtre, le meurtre de son Fils.

Nous avons compris que le Roi est Dieu en personne. Le refus des invités, c’est celui des noces du Fils de Dieu ; l’évènement est tout de même de taille. C’est tout de même l’évènement du Salut du monde, et pourtant… Et pourtant ici, la Parole devient tragique comme tant de paraboles de la fin de la vie de Jésus, car il s’agit bien de la liberté de l’homme. Voyez-vous comme la description de l’inconscience de ces invités est d’une brûlante actualité ?

Comment voulez-vous que j’aille au sacrifice eucharistique, au repas de Jésus, je n’ai que mon week-end pour faire la fête samedi soir et tard dans la nuit, faire de la randonnée, du vélo, du foot, du tennis, et la période de la chasse ? Comment voulez-vous que je participe au repas de Jésus ? Et voyez, vous n’y pensez pas. Il faut bien que j’aille faire mes achats pour la semaine, je n’ai pas le temps.

Comment se fait-il qu’il nous arrive ainsi de préférer nos affaires à l’invitation de Dieu, en vue de la vie éternelle ? Pour une heure offerte à Dieu qui s’offre, une palette incroyable de propositions d’activités vient, je vais dire, submerger, comme effacer ce visage de Dieu dans nos vies. Oh je sais bien, je vois bien que la plupart ne se rendent pas compte de ce qu’ils font.

Dans un deuxième et troisième temps, changement de scène et des acteurs. Aux invités d’honneur, sont substitués une cohue indescriptible de gens ramassés aux quatre coins de la ville, la misère, les mauvais comme les bons, tous ceux qui n’ont rien à perdre et qui ont faim. Les derniers deviendront les premiers à entrer dans la salle des noces ; c’est le coup de filet de la Miséricorde divine. Devant le désistement des premiers invités, le Roi, celui de l’Évangile, loin de renoncer à sa fête, l’élargit pour que la salle des noces soit remplie. L’entrée dans le Royaume de Dieu est ouverte à tous, or un convive ne porte pas les habits des noces. Il aurait dû se changer, c’est-à-dire il aurait dû se convertir ; il est venu pour se régaler, non pas pour célébrer une noce et honorer son hôte.

Je suppose que vous avez été déconcertés par la finale de l’Évangile. Pourquoi ce Roi, contraignant les gens à participer à son banquet, au banquet des noces de son Fils, brutalement devant tous, en jette un dehors ? Jésus parle en parabole et cette parabole est à comprendre dans son ensemble, ça nous le savons bien. Le salut n’est pas automatique, il faut correspondre librement et dans la dignité aux dons de Dieu. La Parole de Dieu et l’Eucharistie que nous célébrons n’est-elle pas le festin des noces de l’Agneau auquel nous sommes invités ? Comment nous sommes-nous préparés ?

Au fond aujourd’hui, soyons comme cet homme qui un jour venait à Jésus pour Lui demander la guérison de son fils : « Seigneur je ne suis pas digne de Te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri. »

La Parole de Dieu est une nourriture qui apporte la guérison et le salut. Nous savons qu’il est un sacrement qui nous offre gratuitement le vêtement des noces, c’est le sacrement du Pardon et de la Réconciliation. Ne négligeons pas le sacrement du Pardon, pour ne pas mettre en échec la Miséricorde divine.

Et en ce mois du Rosaire, nous nous tournons vers la Vierge Marie pour qu’Elle nous accompagne sur ce chemin de conversion. Confions-Lui les drames et les espérances de notre monde. Prions-la aussi pour ceux qui sont persécutés à cause de leur foi. Elle sera toujours là pour nous renvoyer, ou nous tourner plutôt, vers le Christ, vers son Fils.

« Aujourd’hui, ne fermons pas notre cœur, oui, mais, écoutons la voix du Seigneur ».  AMEN