30ème Dimanche du Temps Ordinaire (A)

25 octobre 2020

  • Père Pierre De COINTET, N.D.V. Père Pierre De COINTET, N.D.V.

Introduction : Avec les séminaristes du séminaire Saint Yves de Rennes venant de Bretagne, de Basse-Normandie, du diocèse aux armées Françaises, et aussi du diocèse de Reims et leurs formateurs, nous rendons grâce après six jours de retraite, ici. Accueillis par la Communauté que je tiens encore à remercier pour tout ce qu’ils ont fait pour nous pendant ces jours, et surtout, accueillis par la Vierge Marie qui nous a pris sous son manteau pendant ces six jours de retraite, et elle nous a appris à vivre dans le silence le véritable amour.
Avec elle, nous tous rassemblés, vous tous les jeunes, les guides semble-t-il (= des Cheftaines S.U.F. en formation), et peut-être d’autres par derrière que je ne vois pas, et puis aussi tous ceux qui nous sont reliés par les réseaux sociaux, mettons-nous en présence du Seigneur mort et ressuscité qui renouvelle pour nous les merveilles de la Rédemption dans cette Eucharistie dominicale.
En silence, tournons-nous vers Lui.

 

Homélie : Le séminaire Saint Yves de Rennes, qui termine donc sa retraite et qui est présent dans cette célébration eucharistique, fête cette année les 350 ans de sa fondation par Saint Jean Eudes, en 1670, au cours d’une grande Mission qu’il a fait dans la ville de Rennes avec des prédications, des temps de prière, de confessions et des célébrations liturgiques. Et c’est au cours de cette Mission qu’avec l’évêque de Rennes de l’époque, il a fondé un séminaire. Alors, à cette époque, un séminaire ce n’était pas tout à fait comme aujourd’hui, petit à petit ça c’est développé. A l’époque, les séminaristes n’y venaient que quelques semaines ou au maximum quelques mois, pour un temps de préparation spirituelle, des retraites, et puis aussi pour se préparer notamment au gouvernement des paroisses, et aussi au ministère de la confession, et donc, on leur donnait des conseils, les plus expérimentés les accompagnaient.
Et donc, nous continuons, 350 ans après, à préparer des jeunes qui se préparent à devenir prêtres pour nos diocèses. Et c’est pourquoi encore, comme au temps de Saint Jean-Eudes, eh bien, les séminaristes chaque année, non seulement prient longtemps chaque jour quand ils sont au séminaire, et puis aussi quand ils vont en paroisse, mais font au moins deux grandes retraites d’une semaine, pendant l’année, pour vraiment se tourner vers le Seigneur et pour pouvoir vivre l’Évangile d’aujourd’hui, le double commandement de l’amour de Dieu et du prochain. Finalement, le temps du séminaire, on peut dire que c’est un temps pour que ce feu de la charité soit bien allumé et pour qu’il puisse brûler, durer longtemps, pour qu’il puisse éclairer, réchauffer d’autres, pour qu’il puisse faire des prêtres de demain de vrais missionnaires à la suite de Saint Jean-Eudes et de bien d’autres Saints.

Nous allons bientôt fêter tous les Saints et c’est justement dans les Saints que nous voyons resplendir ce double commandement de l’amour dont nous parle Jésus dans l’évangile, en réponse aux questions des Pharisiens. Si vous avez eu la curiosité de regarder dans Saint Mathieu où se trouve ce passage d’évangile comme on peut le faire chaque dimanche pour se préparer à la messe, vous verrez que Jésus a répondu, un peu avant, à des questions d’autres groupes de gens qu’il côtoyait, les Juifs qui étaient du parti d’Hérode, les Juifs qui étaient Sadducéens, et puis maintenant ce sont les Pharisiens.
Les Pharisiens c’étaient des Juifs pieux, d’ailleurs on dit que Jésus était assez proche d’eux finalement et ces Juifs pieux voulaient être fidèles à la Loi et aux Prophètes c’est-à-dire finalement à la volonté de Dieu que nous cherchons tous et toutes à accomplir aussi, et c’est pourquoi ils essaient de comprendre qu’est ce qui est le plus important dans tout ce que Dieu nous demande dans l’Ancien Testament, dans la Torah et dans les Prophètes.
Et ils posent cette question à Jésus : « Quel est le grand, le premier commandement » ? Et Jésus répond : « C’est d’aimer Dieu d’abord, aimer Dieu de tout son cœur, de tout son esprit et de toute son âme ». Et puis, « Le second commandement lui est semblable », alors là, ça devient un peu plus compliqué pour même les plus jeunes d’entre nous, comment ce qui est premier et ce qui est deuxième, et ce qui est deuxième est semblable à ce qui est premier, on a du mal un petit peu à comprendre. Jésus fait exprès pour nous inviter à aller plus loin, ça semble pas très logique, et c’est un petit peu fait exprès pour nous inviter à creuser un peu plus ce qu’il veut nous dire.

D’abord le premier commandement, pourquoi est-il premier ? Parce que nous venons de Dieu et  nous allons vers Dieu tout simplement. Dieu nous a créés par amour, Dieu nous a fait partager son être, Dieu nous a fait partager sa vie, Dieu nous a fait partager tout ce qu’il est pour que nous vivions pleinement de ce qu’il veut nous donner, pour nous ramener vers Lui. Le péché a rompu ce lien entre les créatures et leur Créateur mais le Christ-Jésus est venu pour rétablir cette Alliance, cette communion des hommes, et des Anges aussi, avec Dieu dans l’amour. Et par le don de l’Esprit-Saint que nous avons reçu au Baptême, par le sang du Christ qui nous purifie, nous sommes recréés à l’image du Fils. La vie de Dieu que nous avons reçue au baptême fait jaillir en nous l’amour filial vers Dieu Notre Père et nous devenons à nouveau capables de l’aimer comme un enfant qui aime son père.

C’est ce que Paul nous disait dans la deuxième lecture, par le baptême nous avons été convertis, nous avons laissé les idoles pour nous tourner vers Dieu et vivre avec Lui.

Alors le premier commandement est premier parce que finalement c’est l’élan de notre vie d’enfant de Dieu qui nous porte vers Dieu. Et c’est pourquoi nous sommes appelés à donner à Dieu la première place dans notre vie. Aimer Dieu vraiment, l’aimer pas seulement du bout des lèvres ou d’un petit bout de notre cœur quand on a envie, mais ce qui s’appelle l’aimer, c’est-à-dire le choisir chaque matin, lui donner la première place, vouloir l’aimer, vouloir son bien à Lui, qui est notre Créateur, notre Sauveur, et le but de notre vie. Déjà ici-bas et pour toujours dans l’au-delà, nous sommes appelés à être avec Dieu. Alors est-ce que nous voulons vraiment l’aimer ? Et cet élan filial qui nous porte vers Lui, est-ce que nous voulons le nourrir par les sacrements, par le sacrement du Pardon, par l’Eucharistie qui nous rassemble aujourd’hui, dans la prière, dans le service des autres ?

Finalement, quand on y réfléchit, qu’est-ce qui fait le cœur de notre existence dans toutes ses multiples facettes ? C’est de donner à Dieu cette réponse d’amour, nous recevons tout de Lui et nous répondons à son amour, « Nous lui rendons amour pour amour », comme disait la petite Thérèse à la suite de Saint Jean de la Croix. Oui, c’est cette réponse d’amour à Dieu dont l’amour est toujours plus grand et qui nous porte vers Lui qui va irriguer toute notre existence, tout ce que nous avons à faire, notre devoir d’état, notre travail, nos détentes aussi, notre vie familiale, notre vie conjugale pour ceux qui sont mariés, notre vie de jeunes pour ceux qui sont encore à l’époque où ils choisissent les grandes orientations de leur vie, notre vie de prière, tout ce que nous avons à vivre peut être imprégné par cet élan vers Dieu et peut être éclairé, fortifié ou illuminé par cette réponse d’amour que nous essayons de donner à Dieu.

Cette réponse d’amour, elle est fondée dans le Christ-Jésus qui a vécu, qui s’est fait homme, Lui qui était Dieu, qui a souffert notre condition humaine jusqu’à la mort, qui a guéri les malades, qui s’est approché des pécheurs jusqu’à mourir comme un innocent sur la croix. Jésus, Fils de Dieu fait homme, vraiment Dieu, a donné au Père la seule réponse d’amour parfaite qui entraîne toutes nos réponses d’amour, et il l’a donnée non seulement en priant Dieu son Père, comme on le voit souvent dans les évangiles, en se levant tôt le matin, la nuit, pour rencontrer Dieu sur la montagne, mais aussi en s’approchant des pécheurs, en allant à leur table, en guérissant les aveugles, les malades, en s’approchant de tous ceux qui étaient dans les épreuves, en s’incarnant dans cette humanité qui est la nôtre, pauvre et pécheresse, et en s’humiliant jusqu’à laver les pieds de ses disciples y compris de celui, de ceux qui allaient le trahir, non seulement Judas mais aussi Pierre d’ailleurs, « Et en les aimant jusqu’à l’extrême », comme dit Saint Jean (13,1), en nous aimant ainsi pour nous sauver.

Et c’est ainsi, en regardant Jésus et en vivant avec Lui que les deux commandements de l’amour s’unissent dans l’amour du Christ, et que nous pouvons comprendre comment ils sont premier et second et en même temps semblables.

Jésus a dit oui à son Père en s’approchant de nous, qui sommes pauvres et pécheurs, c’est le mystère de la Rédemption, de la Nouvelle Alliance définitive scellée dans le sang de Jésus. Parce que la vie du baptême nous unit à Jésus mort sur la croix, Dieu fait homme pour nous sauver et nous ramener vers Dieu, c’est en nous approchant du Christ que l’amour de Dieu et du prochain sont semblables et ne font plus qu’un.

Et c’est bien ce qu’on vécu les Saints, tous les Saints que nous connaissons, les petits et les grands, comme dit le Pape François, les Saints d’à côté de nous, dans nos villages, dans nos familles, dans nos paroisses, les personnes que nous avons rencontrées et qui nous parlent justement de cet amour de Dieu et du prochain. Tous, ils ont vécu à la fois la relation avec Dieu et ils se sont approchés des plus pauvres, de leurs voisins, de leurs voisines, de leurs proches, les servant jusqu’au bout, par amour.

Oui, l’amour de Dieu est premier, il est la source et il est la fin de tout amour, et l’amour du prochain vérifie que notre amour de Dieu est authentique et les deux s’unissent dans l’amour du Christ que nous nourrissons dans l’Eucharistie tout spécialement.

Alors, demandons au Seigneur, dans cette Eucharistie, qu’il ravive en nous cet unique amour de Dieu et du prochain. Qu’il nous laisse nous entraîner dans cet élan filial vers Dieu et dans cet amour qui s’abaisse vers les autres pour les servir. Qu’il nourrisse en nous cette réponse d’amour pour que nous la donnions, chaque jour, dans toutes les multiples occasions de notre existence. Amen.