3ème Dimanche de l’AVENT (B)

13 décembre 2020

  • Frère Marie-Jean BONNET Frère Marie-Jean BONNET

Introduction : Merci aux louveteaux d’être là, votre présence nous apporte de la joie. En tant qu’enfants, vous êtes signe de la jeunesse de Dieu, Dieu nous rajeunit toujours, comme dirait Saint Augustin : le péché nous vieillit mais sa grâce, sa vie nous rajeunit.
Oui, nous sommes invités à la joie, spécialement aujourd’hui, à entrer déjà dans la joie de Noël qui est la joie du Salut, Dieu ne cesse de nous offrir son Salut et si on l’accueille on reçoit sa joie. Eh bien, demandons la grâce effectivement de savoir accueillir le don de Dieu, de savoir entrer dans sa joie à Lui, la joie du Salut.
Reconnaissons que le péché, oui, nous vieillit, nous rend tristes, nous alourdit. Demandons au Seigneur de venir nous libérer pour être plein de sa joie pour pouvoir l’offrir aux autres.

 

Homélie : « Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas » (Jean 1,26).
C’est cette parole de Jean-Baptiste qui m’a marqué en méditant l’évangile de ce jour. Cette parole, Jean-Baptiste l’adresse aux prêtres et lévites envoyés par les autorités religieuses de Jérusalem pour enquêter sur la personne et les faits et gestes de Jean, -les renseignements généraux de l’époque-.
Qu’est-ce que c’est que cet individu bizarre qui vit au désert, et surtout qui draine des foules, et les appelle à changer de vie parce que le Messie, dit-il, est proche ? Ça commence à bien faire, il nous fait de l’ombre. Les autorités religieuses attendent bien un Messie, effectivement comme tout le peuple d’ailleurs, selon ce que nous dit Saint Luc dans un passage parallèle à l’évangile de Jean d’aujourd’hui, mais la plupart attende un Messie politico-religieux qui va chasser l’occupant romain d’abord comme tout le monde l’attend.
Et Jean-Baptiste en affirmant que le Messie est déjà là mais caché, discret, prépare en quelque sorte, j’allais dire à son insu, j’allais dire pourquoi, il prépare en quelque sorte les cœurs de bonne volonté, -de bonne volonté, car il s’agit toujours d’être dans la bonne volonté, sinon on y voit rien du tout-, prépare en quelque sorte les cœurs de bonne volonté à reconnaître le Messie tel qu’il sera effectivement, et non tel qu’on le voudrait spontanément.
Et lui-même, Jean, -je cite Marie-Noëlle Thabut qui est une excellente exégète- : « lui-même, Jean, semble ne pas le connaître encore, ce Messie ». Mystérieux, puisqu’il était le cousin de Jésus, mais c’est pourtant ce qu’il dit un peu plus loin dans ce même évangile, c’est seulement lorsque Jésus s’est présenté à lui pour lui demander le baptême qu’il a eu la certitude qu’il était le Messie : citation de voilà ce qu’il dit : « Je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau c’est lui qui m’a dit : Celui sur lequel tu verras l’Esprit descendre et demeurer, c’est lui qui baptise dans l’Esprit-Saint », (Jean 1,33).
Donc, Jean baptise c’est-à-dire obéit, une inspiration divine, intérieure qui lui demandait d’annoncer le Messie, d’annoncer sa présence au milieu des hommes, et lui-même ne le connaissait pas. Mystère ! « Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas ». Elle est peut-être pour nous aussi cette parole de Jean-Baptiste, le Seigneur nous l’offre dans l’évangile de ce jour, elle a résonné dans mon cœur alors peut-être qu’elle peut résonner dans le vôtre aussi, « Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas ».
Est-ce que vraiment nous connaissons Celui qui est déjà au milieu de nous ? Il y a connaissance et connaissance, connaissance par les sens, c’est la première par nos doigts, le toucher, par nos yeux, par nos oreilles, bien sûr, et un petit loup ça ouvre grand ses oreilles, n’est-ce-pas ? en principe pour écouter « Akela » (c’est le nom de la Cheftaine responsable des louveteaux), mais il y a la connaissance de l’intelligence très utile, très nécessaire, c’est un cadeau du Bon Dieu, mais il y a quelque chose d’encore plus utile, c’est complémentaire, je n’oppose pas, la  connaissance du cœur. Ce n’est pas moi qui le dit c’est quelqu’un qui n’est même pas à ma connaissance croyant, Antoine de Saint Exupéry, « On ne voit bien qu’avec le cœur » et là il a parfaitement raison, d’ailleurs c’est un chef d’œuvre, ce « Petit Prince » que vous connaissez sans doute : « On ne voit bien qu’avec le cœur », et c’est vrai Jésus ne dirait pas autre chose car ces pharisiens justement avaient une connaissance intellectuelle et peut-être un peu scripturaire, quoique Jésus le conteste dans certains passages, du Messie mais ils avaient leur schéma : le Messie doit être comme ci, comme ci, comme ça, c’est pour ça qu’ils ne vont pas le reconnaître quand il sera devant eux.
« On ne voit bien qu’avec le cœur », notre cœur justement n’est-il pas souvent contaminé par l’agitation du monde, toutes ces peurs, difficile de résister à tout ce climat de phobie, de peur, l’agitation, les peurs, la violence, difficile de résister, de ne pas se laisser envahir nous aussi intérieurement par de la violence qui naît de la colère, une colère sans doute légitime en sa source mais si elle engendre de la violence, si elle n’est pas saine, elle ne vient pas Dieu, ne pas rester dans la colère, parce que « la colère se transforme en haine », nous dit Saint Augustin quand on reste dans la colère. Oui, notre cœur est souvent contaminé, reconnaissons-le, par ces peurs, la violence du monde, la désespérance parfois, je pense que nous manquons souvent d’espérance.
Si notre cœur était habité par une foi plus ferme, une espérance plus vive, une charité plus active, plus on aime, plus on est heureux, mais si on reste les bras croisés quand il y a de l’amour à offrir et quand il faut se bouger, on ne peut pas être heureux, on ne peut pas avoir de la joie dans son cœur. Oui, si tout cela, si nous vivions davantage de Celui et avec Celui qui est au milieu de nous et même en nous, je crois que nous serions vraiment habités par cette paix, et même cette joie que le Christ a offerte et promise à ses disciples, selon ses propres paroles : « Je vous donne, je vous laisse ma paix, c’est ma paix que je vous donne » (Jean 14,27), le Seigneur nous a laissé sa paix, la source de sa paix, donc on peut la voir. « Que votre cœur ne se trouble, ni ne s’effraie », (Jean 14,27), et un petit peu plus loin, le Christ ajoute à ses disciples : « Votre cœur sera dans la joie et votre joie nul ne vous l’enlèvera », (Jean 16,22). C’est quand même extraordinaire, le Seigneur nous a donné la source en lui, bien sûr en lui, la source de la paix et de la joie que nul ne peut nous ravir, si vraiment nous restons en Lui.
C’est la joie qui naît de cette expérience, bien sûr, d’être sauvés chaque jour par le Christ, oui ou non, est-ce que nous faisons l’expérience, nous avons la conviction, la conscience d’être sauvés aujourd’hui par le Christ ? Il nous offre tous les moyens du Salut, aujourd’hui. Oui, joie de cette expérience d’être sauvés par le Christ, chaque jour, d’être « revêtus des vêtements du Salut » pour reprendre les mots d’Isaïe (61,10).
Joie qui habite le cœur de Saint Paul, qui pourtant affronte sans cesse mille épreuves, comme il en témoigne lui-même. Voilà pourquoi, fort de son expérience personnelle, eh bien, Paul peut demander aux disciples : « Soyez toujours dans la joie », (1e Thessaloniciens 5,16). Eh oui, si le Christ est dans notre cœur, et si nous le laissons vivre vraiment dans notre cœur, il nous offre, il nous distille sa paix et sa joie.
Eh bien, si comme Jean-Baptiste nous sommes habités par cette joie du Salut, par la joie d’être les amis de l’époux, à côté de lui, avec lui, toujours, lui qui est déjà là au milieu de nous, alors, comme lui, comme Jean-Baptiste, nous aurons un feu dans notre cœur, un trop-plein pour offrir à ceux qui nous entourent cette Bonne Nouvelle : « Au milieu de vous se tient Celui que vous ne connaissez -peut-être- pas », pas encore, mais que je peux vous annoncer, que je peux vous révéler, en tous cas quelque chose de lui.
Oui, vraiment il est la Bonne Nouvelle que le monde attend, parce qu’il sauve, lui seul sauve, délivre, rend libre, il nous offre déjà sa paix et sa joie que rien ne peut nous ravir (cf Jean 16,22). Amen.