Pentecôte (A)

31 mai 2020

  • Frère Philippe-Marie VAGANAY Frère Philippe-Marie VAGANAY

Introduction : L’Esprit-Saint repose en plénitude sur le corps du Christ, sur le corps physique du Christ et sur le corps ecclésial du Christ, et c’est à partir du corps du Christ que l’Esprit-Saint se répand.

Aujourd’hui, c’est la Fête de la Pentecôte, c’est aussi la Fête de la Visitation. Dès que le corps du Christ a été présent dans le sein de la Vierge Marie, l’Esprit-Saint s’est répandu sur Jean-Baptiste, sur Élisabeth, sur Zacharie.

Lorsque le corps du Christ est réuni dans le Cénacle, l’Esprit-Saint se répand par toute la terre, dans toutes les Nations.

Eh bien, accueillons ce don de l’Esprit, rendons grâce au Seigneur pour cet amour qu’il nous donne, cet amour qui fait de nous des fils, et nous pouvons rendre grâce aussi pour l’anniversaire de profession religieuse de Frère Marie-Jean (et de Frère Philippe-Marie).

Et au seuil de cette Eucharistie, eh bien, demandons à l’Esprit-Saint de tourner notre cœur vers le Père de qui vient toute miséricorde.

 

Homélie : La prière d’ouverture de ce Dimanche de Pentecôte nous a fait dire ceci : « Aujourd’hui, Seigneur, par le mystère de la Pentecôte, tu sanctifies ton Église chez tous les peuples et dans toutes les nations ».

« Aujourd’hui », autrement dit, la Pentecôte n’est pas seulement un événement du passé ; elle se réalise aujourd’hui. Ce qui veut dire que les grâces qui ont été celles de l’Église naissante nous sont offertes, à nous aussi, aujourd’hui. C’est ainsi que l’Esprit-Saint rajeunit sans cesse l’Église, lui donnant de retrouver l’impulsion, le dynamisme et la ferveur de sa jeunesse.

« Aujourd’hui, par le mystère de la Pentecôte, tu sanctifies ton Église ».

La prière d’ouverture présente la Pentecôte comme un mystère de sanctification. Dieu seul est Saint. Par le mystère de la Pentecôte, Dieu nous donne part à sa sainteté.

Israël avait conscience d’être le peuple Saint, le peuple de l’Alliance. Et, dans l’Ancien Testament, « sanctifier » est synonyme de « séparer ». Dieu est le seul Saint ; il n’a rien de commun avec le monde créé, il est totalement transcendant. Et pour un Juif, se sanctifier c’est se séparer : se séparer du profane, se séparer du péché, pour ne pas se laisser contaminer par ce qui n’est pas Dieu. C’est pourquoi les Juifs vivent spontanément en ghetto ; c’est pourquoi le Temple de Jérusalem était construit de telle manière que les Juifs et les païens, les hommes et les femmes, les laïcs et les prêtres soient séparés.

Mais alors, la Pentecôte ferait-elle de nous un peuple de séparés ?

Oui, en tant que nous sommes, depuis notre Baptême, porteurs de l’Esprit de Sainteté. Nous avons été arrachés à l’esprit du monde, à l’esprit des ténèbres, pour devenir porteurs de l’Esprit de Sainteté. Rappelons-nous ce qu’a dit Jésus dans sa prière sacerdotale, avant d’entrer dans sa Passion : « Je leur ai donné ta Parole et le monde les a pris en haine, parce qu’ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde » (Jean 17, 14).

Oui, la Pentecôte fait de nous des séparés. Mais elle ne fait pas de nous des isolés. Mettre à part, consacrer, ce n’est pas isoler, retirer du monde. Car depuis l’Incarnation, « sanctifier » se conjugue avec « envoyer ». Jésus a été « sanctifié », « consacré », et envoyé dans le monde.

Déjà, Jésus avait fait de ses disciples des Apôtres, c’est-à-dire des « envoyés ». Et au soir de Pâques, c’est l’évangile d’aujourd’hui, il leur dit : « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Jean 20, 21). Et au jour de la Pentecôte, ce ne sont plus seulement les apôtres, ce sont tous les disciples, les 120 Frères, c’est-à-dire tous les baptisés, qui deviennent des envoyés.

En effet, lorsque les langues, qu’on eût dites de feu, se posèrent sur eux, « tous furent remplis d’Esprit-Saint et ils se mirent à parler ».

Des disciples, l’Esprit-Saint en fait des gens qui parlent, qui sortent.

Ils reçoivent l’Esprit de prophétie qui leur fait proclamer les merveilles de Dieu, chacun s’exprimant selon le don de l’Esprit. Et tous les membres de la Diaspora Juive, présents à Jérusalem pour la Pentecôte, entendent les disciples parler dans leurs propres langues.

Oui, dès la Pentecôte, le Père sanctifie son Église chez tous les peuples et dans toutes les nations. Et cette sanctification devient contagieuse.

L’Esprit de prophétie que reçoivent les disciples ouvre le cœur de ceux qui entendent, et suscite en eux la foi. Et l’acte de foi consiste précisément à reconnaître et à proclamer que « Jésus est Seigneur », c’est-à-dire Jésus est Dieu. « Personne n’est capable de dire : « Jésus est Seigneur » sinon dans l’Esprit-Saint », nous rappelait Saint Paul, tout à l’heure.

Ainsi donc, le baptême et la confirmation font de nous des témoins, des envoyés, des gens qui sortent de chez eux pour annoncer le message de la foi : « Jésus est le Seigneur ». Ceux qui accueillent ce message entrent dans la Vie ; ceux qui ne l’accueillent pas deviennent tôt ou tard hostiles aux envoyés. Autrement dit, l’Esprit de Pentecôte nous lance dans le combat spirituel.

Dans une de ses homélies de sa messe matinale (9 mai 2020), le Pape François a récemment rappelé que l’Esprit-Saint faisait toujours plus grandir l’Eglise, et cela dès les débuts. Mais il a attiré l’attention que de l’autre côté, il y a le mauvais esprit qui cherche  à détruire l’Église. « Il en est toujours ainsi », dit le Pape, l’Église sera toujours en combat ; et il ajoutait : si l’Église ne connaissait pas le combat, ce serait mauvais signe. Et ce combat spirituel se livre d’abord dans  notre propre cœur.

Ce combat consiste à choisir l’Esprit de Sainteté, et par conséquent à se séparer résolument de l’esprit du monde, de l’esprit de Mammon, de l’esprit de corruption, de l’esprit de mensonge, de l’esprit de manipulation. Tous ces esprits qui sont apparus à visage découvert lors de cette crise du Covid 19 que nous venons de connaître.

Choisir l’Esprit de Sainteté, se placer sous la protection de l’Esprit-Saint, qui est un Esprit de pauvreté, certes, mais qui est un Esprit de vie, un Esprit de liberté, qui est l’Esprit de Jésus-Christ, Notre-Seigneur.

Alors à nous de choisir et d’accueillir à plein cœur l’Esprit-Saint pour être renouvelés, sanctifiés et envoyés.

Avec la Vierge Marie, la Vierge de la Visitation et la Vierge du Cénacle, faisons nôtre cette invocation : « Envoie ton Esprit, Seigneur, et tout sera créé ; et tu renouvelleras la face de la terre ». Nous pouvons le dire tous ensemble : « Envoie ton Esprit, Seigneur, et tout sera créé ; et tu renouvelleras la face de la terre ». Amen.