5e DIMANCHE DE CARÊME C 6 avril 2025
6 avril 2025
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Frère Yves FRÉMONT
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Dans l’Évangile d’aujourd’hui, Jésus ne condamne pas la femme adultère. Dieu est au milieu de nous, pour nous renouveler dans la vie divine. Ce qui veut dire qu’aujourd’hui encore, le Christ ne condamne pas le monde, dans lequel nous vivons. Il vient pour le renouveler et il a besoin de nous pour ce travail et cette Eucharistie en fait partie. Nous avons à porter dans notre prière ce monde d’aujourd’hui, afin qu’il se laisse toucher par le Christ qui vient à sa rencontre.
Frères et sœurs, préparons-nous à célébrer le mystère de l’Eucharistie en reconnaissant que nous avons péché.
Homélie
Le père dominicain qui nous a formés ici, le Père Laure, nous disait ceci : « Quand vous prêchez, ayez une idée. Et encore… » Celle que je retiens pour aujourd’hui, c’est : nous faisons des bêtises dans nos vies, nous nous abimons et nous abimons la création, et Dieu, lui, continuellement, il vient tout réparer. Voilà l’idée de la Parole de Dieu d’aujourd’hui.
« Voici que je fais un monde nouveau : il germe déjà, ne le voyez-vous pas ? »
Et si Dieu, là, aujourd’hui, en ce mois d’avril 2025, était en train de préparer sous nos yeux un monde nouveau ? Est-ce que nous le percevrions ?
Dans la première lecture, le peuple hébreu fait l’expérience de l’exil à Babylone et il n’en voit pas le bout. Quand est-ce qu’on sortira de cet exil ? Alors le prophète Isaïe les exhorte, lui qui est au milieu d’eux. Et il leur dit : « Rappelez-vous la sortie d’Égypte. Les troupes et les puissants guerriers d’Égypte les voilà couchés, sans pouvoir se relever. Ils se sont éteints au milieu des eaux puissantes de la Mer Rouge. Alors toi mon peuple, toi qui es exilé, tournes-toi résolument vers l’avenir, ne t’attarde plus à ta situation d’exilé ».
C’est un message d’une grande espérance. En effet, Dieu prépare déjà, pour tous les exilés à Babylone, le retour en terre d’Israël. Aucun signe encore perceptible, il n’en voit pas la couleur de cette promesse absolument incroyable. Mais c’est sûr, le prophète est sûr de sa parole, parce que Dieu est fidèle à son alliance. Il n’a jamais cessé de libérer les siens, de les maintenir en vie, à travers toutes les vicissitudes de leur histoire. N’est-il pas le maître de l’impossible ?
« Voici que je fais un monde nouveau : il germe déjà, ne le voyez-vous pas ? »
C’est important de faire mémoire de l’œuvre divine qui se poursuit, à travers l’histoire des hommes d’hier et d’aujourd’hui. Passé, présent, avenir, Dieu est là à jamais, présent, à nos côtés. A nous d’en avoir la certitude, dans la foi. C’est l’un des sens du Nom de Dieu « Je suis », c’est-à-dire en dehors de moi, il n’y a rien. Si nous existons, nous existons en Dieu, c’est lui qui est.
Durant cette célébration de l’Eucharistie, nous faisons mémoire de la victoire du Christ sur la mort. Nous célébrons la victoire du bien sur le mal. Nous célébrons la victoire de l’amour sur la haine. Dieu est là, présent dans cette célébration, agissant dans la mesure même de notre coopération avec lui.
Notre monde, dans certains aspects de son actualité, laisse paraître la glace de son égoïsme, de sa sensualité, de sa haine, de sa violence, de son mensonge, de son malheur. L’athéisme semble envahir des pans entiers de notre société.
A ce propos, le Pape Benoit XVI disait : « L’occident est en train de faire ce qui n’a jamais existé dans l’histoire de l’humanité, de défier Dieu au point de décider nous-mêmes qui a le droit de vivre et qui doit mourir. » Mais il n’y a jamais eu ça, dans le passé, dans l’histoire de l’humanité. On fait des lois aujourd’hui et c’est nous qui décidons de créer un monde nouveau sans Dieu.
Nos ennemis triomphent. Mais, la Parole de Dieu nous dit, aujourd’hui, la même chose qu’au peuple hébreu : « Voici que je fais un monde nouveau : il germe déjà, ne le voyez-vous pas ? » « Les troupes et les puissants guerriers d’Égypte les voilà couchés, sans pouvoir se relever ». A l’orgueilleuse cohorte des superbes qui s’insurge contre Dieu, la providence divine répond par la cohorte des humbles, des méprisés, des persécutés.
Encore une chose, les plus persécutés des chrétiens dans le monde, ce n’est pas ceux qui sont en Afrique, ce n’est pas ceux qui sont en Asie, ce sont ceux qui sont en Occident. Parce qu’il y a pire que la mort physique, il y a la mort morale. On tue dans nos cœurs à nous la vie du Christ. Si vous n’êtes pas pour l’avortement, si vous n’êtes pas pour le divorce, si vous n’êtes pas pour l’euthanasie, vous n’êtes pas dans la marche du monde. Vous êtes exclus.
Dans l’Évangile, la femme adultère symbolise cette infidélité du peuple à l’alliance. Des prophètes de l’Ancien Testament ont souvent comparé les tentations d’idolâtrie à un adultère, à une infidélité. A notre époque, le progrès scientifique, les progrès techniques peuvent griser le cœur de l’homme et prendre la place de Dieu. Jésus ne condamne pas la femme adultère. Jésus ne condamne pas non plus notre société d’aujourd’hui. Dieu ne veut pas notre mort. Dieu ne cesse, Dieu ne cesse de nous offrir sa vie. Et il le fera jusqu’à la fin des temps, de nous offrir sa vie.
Il invite, par contre, à la conversion, à recentrer la vie sur l’essentiel, sur le nécessaire. « Ne pèche plus. » Arrête de dévier de cette rencontre avec moi. Viens. Vivons l’alliance ensemble. Ne t’éloigne plus de ton Dieu, de la source de ta vie.
Face à la femme adultère, Jésus, c’est-à-dire Dieu, est à l’œuvre, là, avec cette femme. Voici qu’il réalise dans le cœur de cette femme menacée de mort, un monde nouveau. Le Royaume germe déjà en elle. Ne le voyons-nous pas ?
En cette femme, Dieu, une nouvelle fois, restaure nos humanités blessées par le péché. Alors, on comprend la parole de saint Paul aux Philippiens : « Tous les avantages que j’avais autrefois, je les considère maintenant comme une perte à cause de ce bien qui dépasse tout : la connaissance du Christ Jésus, mon Seigneur. »
Cette connaissance n’est pas d’ordre intellectuelle. Au sens biblique, connaitre quelqu’un, c’est vivre dans son intimité. C’est l’aimer, partager sa vie, l’écouter, faire ce qu’on fait en ce moment. On est rassemblés en son nom. On est venu le rencontrer et on est heureux d’être là avec lui. C’est la meilleure des connaissances qu’on peut avoir de Jésus Christ.
Le Pape François, dans sa dernière encyclique Dilexit nos (Il nous a aimés), au numéro 182, dit ceci : « Avec le Christ, nous sommes appelés à construire une nouvelle civilisation de l’amour, sur les ruines que nous avons laissées, en ce monde, par notre péché. Telle est la réparation que le Cœur du Christ attend de nous. Au milieu du désastre laissé par le mal, le Cœur du Christ veut avoir besoin de notre collaboration, pour reconstruire le bien et le beau. »
A sa manière notre Pape reprend le mot d’Isaïe et nous redit l’œuvre incessante de Dieu pour nous libérer : « Voici que je fais un monde nouveau : il germe déjà, ne le voyez-vous pas ? »
Le Christ est vraiment au milieu de nous. N’est-ce pas lui que nous sommes en train de célébrer ? Par conséquent, nous sommes invités à demeurer dans l’espérance. Avec Dieu, avec Jésus Christ, tout est possible !
AMEN