20e Dimanche du Temps Ordinaire B, 18 août 2024

18 août 2024

  • Frère Jean François	CROIZÉ Frère Jean François CROIZÉ

Introduction à la Célébration : Nous venons de chanter « nous formons un seul corps », le corps du Christ. Et ce corps, il a un cœur, c’est le cœur de Dieu et c’est la charité, c’est-à-dire l’amour de Dieu qui anime ce cœur. Demandons au Seigneur la grâce de vivre de cette charité qui est le lien d’amour, le lien qui fait notre unité.

Demandons au Seigneur pardon pour tous ces manques, j’allais dire, de charité, des manques d’amour, au début de la célébration du mystère de l’Eucharistie qui est ce mystère de l’unité, de la charité.

Homélie

Chers frères et sœurs, Saint Paul, dans la deuxième lecture, nous a invité à rendre grâce à Dieu en tout temps, toute circonstance. Alors, permettez-moi de rendre grâce, parce que votre chant remplit l’église. Merci à vous !

Nous sommes en vacances. Et les vacances, évidemment, sont faites un peu pour nous renouveler. Et dans cette atmosphère somnolente de l’été, à ceux qui veulent bien l’entendre, la Parole de Dieu, en ce dimanche, fait l’effet d’un réveil.

Tout d’abord, les Proverbes nous pressent de sortir de l’étourderie : « Vous, étourdis, passez par ici. » Invitation des Proverbes. Et le passage des Proverbes précise que les étourdis, dans leur étourdissement, sont ceux qui manquent de bon sens, il les appelle les insensés. Et quel chemin l’auteur des Proverbes nous presse-t-il de prendre ? Selon lui, nous sommes invités, par les servantes de la sagesse, personnifiée, à pénétrer dans un palais, aux sept colonnes, pour un festin. Il s’agit donc d’une invitation, une invitation criante d’habiter, de vivre heureux dans cette maison, dans ce palais, pour ne pas risquer de se détourner, de se perdre dans la foire des insensés.

Pour cet auteur inspiré, ce n’est pas compliqué, l’humanité se divise d’un côté en disciples et servants de la sagesse et de l’autre en insensés. Les uns ont le sens de la création, c’est-à-dire qu’ils savent d’où ils viennent et où ils vont. Les autres cultivent l’orgueil de l’intelligence, le désordre des désirs.

Comprenons bien que la sagesse s’oppose, non pas à l’ignorance, mais à la sottise. Tel ignorant, et nous le sommes tous quelque part, peut être sage dans sa conduite. Et tel savant peut être un sot, dans sa manière de se centrer sur son ego et de décréter pour lui-même le sens de l’existence.

Pour nous chrétiens, il nous faut être attentifs. Nous reconnaissons que la maison bâtie par la sagesse était essentiellement la personne du Seigneur Jésus, sagesse incarnée. Et nous sommes invités à le rechercher et à demeurer en lui. Nous pouvons comprendre que la signification des sept colonnes est la Sainte Écriture, les sacrements, l’Église Eucharistie, l’enseignement de l’Église, la vie chrétienne dans la foi, l’espérance et l’exercice de la charité.

En ce sens, nous trouvons en Saint Paul un stimulant. « Prenez bien garde à votre conduite, dit-il, ne vivez pas comme des fous, mais comme des sages. Ne soyez donc pas insensés. » Et dans l’épitre aux Galates, il dénoncera 14 façons de vivre en insensés. L’exhortation de Saint Paul est un appel à la vigilance. Autrement dit, veillons à ne pas nous laisser droguer, fasciner par le climat ambiant d’un monde sans Dieu. Car la création évolue vers une mystérieuse rencontre avec Dieu, dans le Christ, qui demande notre participation active et responsable à la construction de ce monde aussi.

Et Saint Paul insiste : « Tirez parti du temps présent et comprenez bien quelle est la volonté du Seigneur. » Et pour accomplir la volonté du Seigneur, il nous invite à ne pas gaspiller le temps qu’il nous est donné de vivre.

Alors, qu’est-ce ça veut dire ? D’abord, ne pas se laisser mener par la vie, mais prendre possession du temps. Car d’une part, dit-il, les temps sont mauvais dit-il, en ce sens qu’ils sont l’objet de tribulations et d’épreuves, de tentations et de périls. D’autre part, ajoute-t-il, les temps sont bons, car ils sont un don de Dieu. Pendant notre vie sur terre, nous sommes dans le temps favorable à notre salut, lorsque nous ne négligeons pas de mettre Dieu dans notre vie. Notre vie de charité donne de la valeur au temps et le temps est le prix de l’éternité.

De plus, Saint Paul nous fait comprendre que la sagesse de vie implique l’intelligence du temps. La foi est ce radar qui permet de suivre la route en détectant et en évitant les obstacles. Il précise qu’une telle intelligence, ne s’acquière que si nous nous laissons remplir de l’Esprit Saint.

Comment nous laisser remplir de l’Esprit Saint ? Certes, nous l’avons reçu au Baptême et nous sommes Confirmés dans l’Esprit Saint. Mais il faut en vivre. Et c’est précisément, dans la communion eucharistique que nous sommes renouvelés dans l’Esprit. Voilà ce que nous rappelle la prière liturgique de la messe : « Quand nous serons nourris du Corps et du Sang du Seigneur ressuscité et ainsi remplis de l’Esprit Saint, nous formons un seul Corps, le Corps du Christ. » Quand nous serons nourris du Corps et du Sang du Seigneur.

Jésus avait dit, avait insisté et redit à la foule des Juifs, ce que nous avons entendu dans l’Évangile : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi. » La foule a été choquée bien sûr, parce qu’elle le voyait en chair et en os. Or, il nous faut faire attention à son affirmation qui précède : « Moi, je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie, au monde. »

Jésus est ce pain vivant descendu du ciel. Cela nous rappelle la manne au désert. A la différence que, le septième jour, jour de sabbat, il n’y avait pas de manne dans le désert. Dieu se réservait ce jour pour le pain véritable, le pain descendu du ciel. Jésus donc dit clairement : « Le pain que je donnerai, – c’est donc au futur – c’est ma chair qui sera donnée pour la vie du monde. » C’est ce que, précisément pendant la concélébration, n’est-ce pas, on offre le pain qui devient le Corps et le vin qui devient le Sang, pour le salut du monde.

Au moment où Jésus parle, il n’a pas encore vécu son heure, le sacrifice de la Croix, avec la résurrection et le don de l’Esprit Saint. Or, c’est à travers son sacrifice que Jésus apporte la vie au monde. Déjà, Jésus a devant les yeux la Croix, la résurrection, le don de l’Esprit Saint, c’est-à-dire le sacrifice rédempteur qui donne la vie au monde.

Le Christ a parlé fort et clair. Il n’a pas craint de soulever les plus vives critiques et de risquer l’échec et l’abandon des Juifs. Son message de salut a été rejeté par la plupart des Juifs et a troublé, même, ses disciples. Mystère de la foi bien sûr, mais la vie éternelle est à ce prix. Le Christ est venu nous transfuser cette vie, celle qui jaillit du Père. Pour celui qui mange et boit la chair du Seigneur, la vie éternelle n’est pas à venir, elle est commencée, elle coule en nous.

Jésus ajoute cette confidence : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi je demeure en lui. » Demeurer. Dieu seul demeure. Il n’est de repos, de stabilité, de vie en paix qu’auprès de lui. Le Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous.

Pour le don inouï du Seigneur, dans son Eucharistie, nous faisons nôtre la prière de louange du psalmiste : « Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur. Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse à mes lèvres. Je me glorifierai dans le Seigneur, que les pauvres m’entendent. Rien ne manque à ceux qui le craignent. Des riches ont tout perdu, ils ont faim. Qui cherche le Seigneur ne manquera d’aucun bien. »

Oui, il n’y a pas de geste plus engageant sur cette terre, que celui de recevoir la Sainte Eucharistie. Car, c’est le Ciel que nous recevons et que nous acceptons de recevoir par pure grâce. Oui, la petite hostie, c’est le Ciel. Si telle est notre foi, le Ciel est en chacun de nous. AMEN.