28e DIMANCHE Du Temps Ordinaire (B)
10 octobre 2021
- Frère Jean François CROIZÉ
Introduction : Bienvenue aux Scouts (et Guides) de France qui sont arrivés depuis hier pour leur camp. Ils sont présents avec nous. Merci à vous !
Bienvenue aussi aux familles de l’École de prière. Nous reprenons, après une année d’arrêt, l’École de prière. On repart maintenant avec ces dimanches. Merci aux familles qui sont là aujourd’hui pour cela !
Et nous prions aussi particulièrement pour le groupe Alpha de Châteaubriant qui est en retraite à l’hôtellerie. Ils auront la Messe cet après-midi.
Aujourd’hui, le livre de la Sagesse nous dit : « J’ai prié et le discernement m’a été donné. J’ai supplié et la Sagesse est venue jusqu’à moi. » Aujourd’hui, l’Église a besoin de discernement et de sagesse pour traverser cette crise profonde qui l’a atteint en profondeur, particulièrement les victimes. Et nous demandons au Seigneur de recentrer notre regard et notre cœur sur le Christ. Plus on s’écarte du Christ, plus on se trouve face à soi-même.
Demandons au Seigneur, justement, cet esprit de docilité à l’Esprit-Saint qui nous conduit sur la voie de la charité, sur le chemin du Christ. Entrons dans cette célébration en nous reconnaissants tous pécheurs devant Dieu et nous avons tous besoin de la miséricorde du Seigneur.Homélie : Chers frères et sœurs, « Sagesse vaut mieux que richesse », nous dit un proverbe. Aujourd’hui, le Seigneur veut nous faire comprendre qu’il est nécessaire de passer d’une sagesse humaine à la Sagesse divine, car, nous dit le livre de la Sagesse : « elle est plus précieuse que l’or. » Il est une sagesse qui est à notre portée et qui est agissante, pénétrante et porte du fruit, c’est la Parole de Dieu, ainsi le professe la Lettre aux Hébreux : « La Parole de Dieu est une parole vivante, énergique qui pénètre au profond de l’âme et qui sera notre juge devant Dieu ».
C’est le trésor sans prix qui ne peut pas être en concurrence avec les richesses terrestres. Abandonner nos richesses pour recevoir celles du Christ. Tout est possible avec Dieu, car celui qui suit le Christ a et aura une nouvelle famille, plus grande, plus riche. L’exigence-clé pour suivre Dieu est de Lui donner la primauté, le reste n’est qu’un plus. On peut avoir ou non des richesses, mais il est nécessaire que le cœur ne soit pas absorbé par les biens de la terre.
Dans le récit de l’Évangile de ce dimanche, nous voyons de nouveau Jésus sur le chemin de Jérusalem. Il monte vers un dépouillement total, sur la croix. Et aujourd’hui encore, nous assistons à une rencontre de Jésus avec un jeune homme. On est un peu pensif et troublé en écoutant l’histoire de ce jeune homme riche, qui n’a pas eu le courage de suivre Jésus. « Il en devint sombre et il s’en alla tout triste, car il avait de grands biens. »
Et pourtant, nous pouvons penser qu’il s’était présenté avec empressement et le visage rayonnant de candeur, de sincérité, de générosité au point de bouleverser Jésus : « Jésus le fixa du regard et se mit à l’aimer. » Les yeux, le regard de Jésus sur ce jeune homme ! La question du jeune homme portait, comme nous l’avons entendu, sur « les bonnes œuvres à faire », sur les commandements à observer, persuadé, et souvent comme chacun de nous, que la récompense des bonnes œuvres est le salut.
Dans sa pédagogie, Jésus répond en deux temps. Il s’adresse d’abord au fils de la loi qu’il est. Il pratique la loi. Il s’en reconnait comme le Fils. Il lui rappelle en effet l’importance des œuvres et il cite le Décalogue, qu’il connait très bien ce jeune homme, en ajoutant : « de ne faire du tort à personne », tentation tellement récurrente pratiquée de tout temps, surtout s’il y a des biens à défendre ou à accaparer.
Puis Jésus s’adresse à un possible fils de la foi, l’acte de foi de donner sa confiance en Jésus. Il lui énonce « ce qui manque » pour être parfait : c’est-à-dire l’impensable : tout quitter, se défaire de tout ! Là précisément, Jésus vient de toucher au point sensible, en laissant entendre que le vide radical, c’est-à-dire qui va jusqu’à la racine du cœur, sera rempli et habité par lui, Jésus, et Jésus seul. En d’autres termes, il ne s’agit plus de suivre une loi, mais de suivre une personne et quelle personne ! « Vends tout ; puis viens, suis-moi ». Jésus ne lui demande pas d’abord de le suivre et plus tard de se défaire de ses biens.
Quel est donc le motif profond de ce dépouillement ? Il nous bouscule car ni l’assistance des pauvres, ni même la récompense du ciel, mais la volonté de se mettre à la suite de Jésus, ce qui exige un arrachement radical à tout le reste. Entendons bien qu’à la suite du Maître, les œuvres ne seront plus la cause du salut, mais le fruit de la foi. Car tout don vient de Dieu et de Dieu seul. C’est un renversement dans notre conception de voir et de penser les choses.
C’est ainsi que ce jeune homme riche qui avait couru à la rencontre de Jésus, s’était mis à genoux devant Lui, -vous vous rendez compte ! Il l’avait reconnu comme un être qui peut lui donner quelque chose- et, à celui qui est le Chemin, il avait demandé le sens et la direction de sa vie. Ce jeune homme qui avait un instant émergé de la foule, attiré par la lumière, tout d’un coup, la foule se referme sur lui et l’engloutit. Nous n’en saurons plus rien. Face à Jésus et regardant tout autour de lui, il ne reste plus que les disciples. Toujours ce regard de Jésus. « Un regard qui nous emmène en haut, jamais il ne te laisse. Jamais ! il ne t’abaisse jamais, il ne t’humilie jamais. Il t’invite à te lever. Un regard qui te fait grandir, avancer, qui t’encourage, car il t’aime. Il te fait ressentir qu’il t’aime. », nous dit le Pape François.
Le malheur n’est pas d’avoir des biens, mais les ayant, d’y mettre tout son cœur, être enfermé. Notre jeune homme était prêt à toutes les œuvres bonnes, mais de sa générosité il ne gardera que la tristesse de ne pas avoir osé le sacrifice de ses biens. Il voulait être parfait, mais à peu de frais. Il est des moments de grâce où l’on doit consentir aux gestes les plus déchirants. Même employée à faire le bien, la richesse le sauvera-t-elle ?
Le cœur de l’homme, comme dit Saint Augustin, est fait pour Dieu, et c’est vers Lui qu’il doit aspirer, tout en se « servant » des réalités temporelles. Alors, laissons le Seigneur pénétrer dans nos cœurs avec le glaive à deux tranchants de Sa parole, parce qu’à la lumière de Sa sagesse nous pouvons évaluer les choses terrestres et éternelles, et devenir libres et pauvres pour Son royaume. Jésus avait déjà annoncé que pour sauver sa vie il fallait être prêt à la perdre pour et par son amour –c’est à dire : pour Le suivre il est nécessaire de se renier, dit-Il, et de prendre sa croix. Se renier, c’est-à-dire mettre d’abord, dans sa vie, Jésus. Ça ne veut pas dire, aimer moins. Ça veut dire aimer plus Jésus.
Et en entendant cette rencontre avec ce jeune homme, comment ne pas penser à Marie, lorsqu’elle fut visitée par un Ange, un envoyé de Dieu. Marie ne s’était pas précipité au Temple pour connaître la volonté du Seigneur, car c’est le Seigneur par l’intermédiaire de son Ange qui est venu, avec empressement, la solliciter, chez elle. Et l’Ange s’était incliné devant Marie. Et Marie s’est inclinée avec humilité devant la Parole de Dieu sur elle. Comme le jeune homme, elle a posé une question de sens, l’Ange lui a répondu et elle a dit « oui » sans retour sur elle-même. Et son « Oui » du plus profond de son cœur, de celui-ci, elle a accueilli en son sein le Fils du Très-Haut, Dieu lui-même. Le Ciel dans son cœur.
Que l’exemple de la Vierge Marie soit pour nous un exemple à accueillir et à vivre nos petits oui quotidiens dans la confiance et l’abandon qui nous préparent à ce grand oui que nous aurons à donner un jour, lorsque le temps sera venu de rencontrer le Seigneur en vérité, à l’heure du grand passage. Amen.