13ème Dimanche du Temps Ordinaire (A)

28 juin 2020

  • Frère Philippe-Marie VAGANAY Frère Philippe-Marie VAGANAY

Introduction : Après le Temps Pascal, après toutes ces Solennités que nous avons vécues tous ces derniers dimanches, nous retrouvons les Dimanches du Temps Ordinaire. Avant la réforme conciliaire, ces dimanches on les appelait : « les Dimanches après la Pentecôte », c’était, je trouve, une belle expression, car effectivement nous sommes invités maintenant à vivre de l’Esprit de la Pentecôte, de cet Esprit qui nous a libérés par la grâce du baptême et c’est ce que nous chantions dans ce chant d’entrée : « Dieu te veut libre aujourd’hui ».

Aujourd’hui, nous sommes peu nombreux dans les stalles, toute une délégation de Frères a été dans les Deux-Sèvres pour s’unir à la joie de nos Confrères, les Chanoines Réguliers du Latran, qui fêtent leurs 150 ans de présence en France, donc à l’abbaye de Beauchêne, et nous sommes en communion avec eux.

Au seuil de cette Eucharistie, demandons au Seigneur de nous renouveler dans la grâce de notre baptême, de vraiment choisir cette liberté qu’il nous a offerte et c’est ce à quoi l’évangile nous appelle.

Alors, reconnaissons que nous sommes pécheurs, reconnaissons que bien souvent nous choisissons ce qui nous rend esclaves, ce qui nous rend dépendants, prisonniers.

Demandons au Seigneur sa miséricorde pour être renouvelés dans cette liberté des enfants de Dieu.

 

Homélie : La première lecture a mis sous nos yeux la générosité de cette femme Sunamite qui a accueilli le Prophète Elisée, comme, quelques années avant elle, la veuve de Sarepta avait accueilli le prophète Elie.

Cette femme est généreuse, elle accueille Elisée en sa qualité d’homme de Dieu. Pour elle, accueillir le prophète, c’est presque accueillir Dieu.

On nous dit que cette femme était riche ; mais pour elle c’était s’enrichir plus encore que d’accueillir un homme de Dieu. Car accueillir un homme de Dieu, c’est accueillir une bénédiction, et c’est ce qu’il y a de plus riche. Ce qui fera dire à l’auteur de la lettre aux Hébreux : « N’oubliez pas l’hospitalité, car c’est grâce à elle que quelques-uns, à leur insu, hébergèrent des Anges » (Hébreux 13, 2).

Cette femme généreuse fait construire pour le prophète une chambrette en pierre sur la terrasse de sa maison, ce qui procure la fraîcheur pour l’été et la chaleur pour l’hiver. Et là, solitaire, jouissant d’une vue magnifique sur la nappe verte de la plaine de Yizreel et sur la barre mauve du Mont Carmel, l’âme du prophète s’élèvera sans effort dans la contemplation. Ainsi, par son hospitalité, la bénédiction demeure-t-elle chez cette femme.

En étant ouverte à un de ses semblables, le cœur de cette femme était ouvert à Dieu. Elle vivait déjà ce que dira plus tard Saint Jean : C’est en aimant son frère que l’on voit qu’on aime Dieu qu’on ne voit pas, (cf 1 Jean 4,20).

Accueillir Dieu en accueillant son prochain !… Mais quelle est la disposition nécessaire pour accueillir Dieu ? Saint Paul nous donne la réponse dans la deuxième lecture : Pour pouvoir accueillir Dieu, il est nécessaire de renoncer définitivement à tout ce qui n’est pas Dieu. Et il traduit ce renoncement radical par un mot choc : le mot « mort », qui est revenu 9 fois  dans notre lecture.

Si Jésus est mort, c’est d’abord au péché qu’il est mort. Jésus a préféré perdre la vie du corps que de perdre la vie de Dieu. Et nous, bien souvent nous sommes tentés de tout perdre, même la vie de l’âme pour conserver la vie du corps, et on va voir des guérisseurs, des magnétiseurs, etc…

Saint Paul nous appelle à cette même radicalité que celle qu’a choisi Jésus : mourir à tout ce qui n’est pas Dieu. Etre dans l’amitié de Dieu est la seule richesse véritable, celle qui ne passera pas. Préférer autre chose à Dieu, (un bien  matériel, une personne, soi-même, sa santé,) c’est être finalement dans l’indigence. La seule vie qui vaille, pour Saint Paul, c’est une vie pour Dieu en Jésus-Christ, et la condition, c’est d’être mort au péché.

Alors la question se pose à nous : « Est-ce que je veux mourir au péché pour vivre à Dieu ? Est-ce que je le veux vraiment ? » C’est bien sûr impossible sans la grâce, mais la grâce ne peut rien sans notre détermination.

Le « Je voudrais bien » ne suffit pas . L’engagement de notre « Je veux » est nécessaire.

C’est ce même enseignement sur l’hospitalité et sur le renoncement que nous avons entendu de la bouche même de Jésus dans l’évangile. Jésus ne nous demande pas de négliger nos devoirs envers nos parents. Il fustigera même ceux qui consacrent leur argent à Dieu et qui ne viennent pas en aide à leurs parents (cf Matthieu 15, 1-3), sous prétexte que cet argent appartient maintenant à Dieu et donc on ne peut pas s’en servir pour ses parents. Mais Jésus nous demande de le préférer à tous, même à ses propres parents. De même les parents doivent préférer Jésus à leurs propres enfants. Ce peut-être crucifiant parfois. D’où l’invitation de Jésus à prendre notre croix à sa suite. Et Jésus le vivra le premier : il renoncera à tout pour Dieu. Il renoncera à sa mère, qu’il confiera au disciple qu’il aimait ; Il renoncera aux siens ; et il renoncera à sa toute puissance, à sa propre vie.

La croix n’est pas un objet de culte, elle n’est pas un bijou, c’est un instrument de torture. Suivre le Christ, être son disciple, peut mettre notre cœur à la torture, parfois.

Autrement dit, faire entrer le Christ dans notre vie, en faire l’hôte de notre âme nous conduit au combat spirituel. D’où le sacrement de confirmation que nous avons reçu pour être fortifiés dans ce combat, un combat qui n’est pas optionnel, mais absolument nécessaire.

Ce combat est le choix radical entre la vie et la mort, entre la lumière et les ténèbres, entre la vérité et le mensonge.

Ce combat est celui de la foi c’est-à-dire de notre adhésion concrète à Dieu. Nous allons, dans un instant, professer notre foi pour pouvoir communier à la même Eucharistie.

Eh bien ! Que cette profession de foi soit celle de toute notre vie, de tous les actes concrets de notre vie, afin que peu à peu nous soyons identifiés à ce que nous recevons : le Corps du Christ. Amen.