15ème Dimanche du Temps Ordinaire C 2022

10 juillet 2022

  • Frère Marie-Jean BONNET Frère Marie-Jean BONNET

INTRODUCTION à la Célébration : L’église est bien remplie, ça fait toujours du bonheur, de la joie.
Nous sommes heureux d’accueillir une cohorte d’enfants de chœur qui sont de ce patronage Notre Dame du Lys, et qui est parmi nous depuis quelques jours, et pour encore une semaine je crois, Notre Dame du Lys de Paris, avec son directeur Kévin et son recteur, recteur de la chapelle le père François Scheffer.
Nous sommes heureux également d’accueillir le père Jean de Soos, du diocèse de Carcassonne. Ce n’est pas souvent que nous avons des prêtres qui viennent de si loin.
Ensemble nous venons effectivement nous mettre à l’écoute du Seigneur parce que sa Parole est source de vie et de bonheur. Est-ce que nous y croyons ? Jamais assez, sans doute. Eh bien, aujourd’hui, demandons cette grâce, et demandons-la à la Vierge Marie, la toute écoutante de Dieu, cette Grâce d’écoute aimante de la Parole de Dieu qui est là pour nous vivifier.
Reconnaissons que, voilà, nous avons tant de résistances, de peurs dans nos cœurs, peur de Dieu, peur de ses exigences, et pourtant Il ne veut que notre bonheur. Demandons cette Grâce de foi et d’écoute, en reconnaissant que nous avons péché.

 

HOMÉLIE : Lorsque nous entendons cette parabole, et la finale de Jésus : « Va, et toi aussi, fais de même », eh bien, nous comprenons effectivement que Jésus nous dit : « à toi aussi, de devenir le prochain de l’autre, fais-toi proche des autres, quels qu’ils soient, et spécialement de ceux qui sont dans le besoin. »
Alors là, il y a toujours du pain sur la planche, mais il s’agit de demander au Seigneur de dessiller nos yeux, parce que nous sommes souvent, hélas je crois, comme ce prêtre et ce lévite, nous avons mille excuses pour ne pas faire le bien qui serait à notre portée. Oui, je crois qu’il est utile de temps en temps de demander au Seigneur de nous éclairer, de faire le point sur ce bien, ces péchés d’omission, tout ce bien que nous pourrions faire, que notre vie pourrait porter et que nous omettons de faire, sous mille prétextes, bons prétextes, bien sûr.
À ce Docteur de la Loi qui veut savoir dans quelle mesure, dans quelles limites, il est tenu d’aimer, de faire preuve de pitié, de bonté, Jésus révèle que l’amour ne peut être enfermé dans des catégories, des limites, des barrières de classe, de race, de religion.
Et ceci, eh bien, parce que comme nous le dit Saint Paul dans cette lettre aux Colossiens que nous venons d’entendre, Jésus est justement l’Envoyé du Père pour tout réconcilier. Le péché a divisé, a morcelé l’humanité, nous ne le savons que trop aujourd’hui. Mais Jésus est l’Envoyé du Père pour tout réconcilier, faisant la paix par le Sang de sa Croix, la paix pour tous les êtres, pour que tous les êtres vivent dans Sa paix sur la terre et dans le Ciel.
Mais il faut donc noter aussi très spécialement que le prochain dans la parabole imaginée par Jésus, c’est donc bien d’abord le Samaritain, avant d’être cet homme blessé dont il faut se faire proche. C’est d’abord ce Samaritain, dont le Juif, le Docteur de la Loi n’ose même pas prononcer le mot « Samaritain », celui qui a fait preuve de pitié, dit-il, tellement ce mot lui est en horreur. Ce Samaritain que le Docteur de la Loi méprise, pour ne pas dire honnit, parce que c’est un métis, et qui plus un hérétique.
Jésus veut donc convertir le regard de son interlocuteur, l’inviter à reconnaître que ces Samaritains qu’il ne peut pas sentir sont capables d’une plus grande bonté que certains Juifs pratiquants, et même que certains prêtres ou lévites, qui devraient donner l’exemple de la bonté, et que, par conséquent, il faut reconnaitre, admirer et imiter le bien qu’ils font, ces « sacrés » Samaritains.
Il nous est certainement arrivé d’entendre et de constater que des non-chrétiens et des non-croyants sont capables d’une plus grande humanité, et d’une plus grande générosité que certains chrétiens, hélas. Et nous avons à en prendre leçon, non pas hélas parce qu’ils font le bien, mais hélas parce que certains chrétiens effectivement ne donnent pas le témoignage qu’ils devraient donner, et donnent parfois des contre témoignages, nous ne le savons que trop aussi par l’actualité.
Ce prochain que nous devons aimer comme nous-mêmes, c’est donc d’abord, pour Jésus, tous ceux qui, au cours de notre vie, se sont faits proches de nous, ceux qui nous ont aidés à vivre, à grandir, à franchir des passages difficiles, à survivre même parfois.
Ce sont donc en premier nos parents, évidemment : nous ne leur devons rien moins que la vie. Ils ont, la plupart du temps, fait de leur mieux pour nous offrir protection, affection et croissance. Oui, sans doute, ils avaient certainement leurs lacunes, leurs maladresses, leurs défauts, et cela ne remet nullement en cause une juste reconnaissance pour tout le bien que nous leur devons. « Honore ton père et ta mère » : voilà ce que Dieu a inscrit dans le cœur de l’homme, cette loi naturelle. L’ingratitude envers ses parents est une faute grave parce que nous leur devons rien moins que la vie et bien plus. Et pourtant, des parents sans nouvelles de leurs enfants, cela existe, et des grands parents, coupés de leurs petits enfants, cela existe aussi, et même chez des soi-disant chrétiens.
Notre prochain à aimer, c’est aussi tous ceux qui nous ont aidés à grandir en taille, en sagesse et en grâce, pour reprendre les mots de Saint Luc, tous ceux spécialement qui ont été une oreille bienveillante, une main tendue pour traverser des moments plus difficiles, sans oublier, peut-être, la kyrielle de soignants auxquels nous avons eu recours ; toutes ces personnes aussi qui nous ont marqués par leur vie, leur témoignage de vie, qui nous ont stimulés, éclairés, pour tracer notre propre chemin et trouver notre vocation.
Et c’est encore, bien sûr, le conjoint et tout ce que nous lui devons. Que de péchés d’omission sans doute pour manifester la gratitude à notre conjoint !
Ce sont encore évidemment les enfants qui reçoivent des parents, mais ils apportent aux parents, n’est-ce pas ? Je pense que vous en êtes convaincus, vous, les parents ; les parents qui stimulent leurs parents à grandir dans le don de soi, donc, dans l’amour qui nous dérange, oui, qui dérange parfois notre égoïsme, et nous pousse et provoque à aimer davantage.
Ce sont encore tous ces amis qui ont mis de la joie et du sel dans notre vie, et ils étaient là aussi pour nous aider dans les moments de turbulence.
Mais le prochain par excellence, c’est Dieu Lui-même puisque, justement, nous lui devons tout, en particulier le partage de sa propre Vie qu’Il nous a offerte au Baptême, et qu’Il ne cesse de nous offrir par les Sacrements et toute la vie de l’Église.
Le prochain, c’est le Christ qui s’est tellement fait proche de nous qu’il est venu partager notre vie. Qui plus que Lui s’est penché sur notre humanité blessée et pécheresse pour la soigner et la relever ? Oh, sans doute, j’en ai parlé ici déjà, mais j’aime à rappeler cette sculpture que j’aime beaucoup, où l’on voit effectivement cet homme blessé, et qui est porté à la tête et aux pieds par le Père et le Fils et l’Esprit aussi qui plane, et qui vient comme répandre une onction de douceur sur cet homme blessé qui nous représente.
Alors, n’est-ce pas une très grande ingratitude que de négliger le Seigneur, et de passer nos journées sans Lui alors qu’Il ne cesse de nous faire du bien ? Je crois que l’Évangile de ce jour nous invite à reconnaître les dettes de gratitude, de reconnaissance, que nous avons envers les autres et envers le Seigneur, et à choisir de mieux nous en acquitter dans la mesure du possible.
Et je termine par ces mots du Père Denis Sonet : « La charité bien comprise n’est donc pas cette corvée ou cette condescendance, de la pitié en face d’une personne dans le besoin, elle est joie, la charité ».
Saint Paul nous le dit aussi, elle est joie, l’amour de la charité est joie. Elle est joie, paix, joie de la reconnaissance pour ceux qui nous ont tellement apporté. Oui, quand on fait le point, quand on essaie de se souvenir de tout ce que nous devons aux autres, on pourrait faire une longue liste, un long listing. Joie de la reconnaissance pour ceux qui nous ont tellement apporté. Joie aussi de donner de sa joie à ceux qui n’ont pas eu notre chance.
Et de citer un écrivain qui n’est pas spécialement chrétien, loin de là, je crois : « Mon bonheur est d’augmenter celui des autres. J’ai besoin du bonheur des autres pour être heureux ». AMEN.