19ème Dimanche du Temps Ordinaire (A)

9 août 2020

  • Frère Philippe-Marie VAGANAY Frère Philippe-Marie VAGANAY

Introduction : Nous souhaitons la bienvenue au Père Pascal du diocèse de Paris (qui est de ce côté) et au Père Guillaume Camillerapp qui nous vient du diocèse de Rennes.

« Dieu nous veut libres », venons-nous de chanter, et de quoi Dieu nous libère-t-il ? Eh bien, l’Évangile nous dira que Dieu en Jésus nous libère du découragement et de la peur. Donc, nous sommes invités à mettre toute notre confiance en Lui, de nous appuyer sur Lui, de faire fond sur Lui.

Aujourd’hui, l’Église se souvient de Sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix, co-Patronne de l’Europe, qui s’est totalement appuyée sur Jésus, jusqu’à donner sa vie pour Lui.

Prions, prenons l’Europe dans notre prière, cette Europe qui justement ne s’appuie plus sur Jésus, qui a renié ces fondements chrétiens.

Prions aussi pour le Liban qui a été durement attaqué cette semaine.

Implorons le Seigneur, demandons sa miséricorde, confessons sa victoire. Quand nous disons : « Je confesse à Dieu », nous confessons à la fois la victoire du Christ et nous confessons notre misère, notre péché.

Eh bien, entrons dans cette célébration par cette double confession de foi et de demande de pardon.

 

Homélie : Les lectures de ce dimanche sont d’une telle richesse qu’il faudrait passer plusieurs heures pour les savourer et les commenter.

La première lecture et l’évangile ont pour contexte la menace de la tentation.

Elie, qui fuit la colère vengeresse de la reine Jézabel, est parti dans le désert pour se laisser mourir, tentation du découragement et du désespoir, qu’on appelle aussi l’acédie.

Les disciples rassasiés par le pain multiplié par Jésus sont menacés par une autre tentation, la contagion d’un messianisme politique : Alors, Jésus oblige les disciples à monter dans la barque, il les oblige, pour les faire échapper à la surchauffe politico-religieuse des foules, « qui veulent se saisir de Jésus pour en faire leur roi », c’est Saint Jean (6,15) qui nous le dit. Nous savons comment se sont terminés tous les messianismes politiques précédant la venue de Jésus : par des bains de sang.

Ainsi Jésus éloigne-t-il ses disciples, trop faibles, de la tentation d’un faux messianisme purement politique, humain, horizontal. Et lui-même se rend dans la montagne pour se recentrer sur son Père.

Nous avons donc deux tentations d’une même espèce mais qui vont en sens opposé : la tristesse spirituelle, le découragement, et de l’autre côté l’exaltation humaine. A ces deux tentations, la Parole de Dieu apporte un unique remède : se recentrer sur Dieu.

« Approchez-vous de Dieu et Lui s’approchera de vous », dit Saint Jacques (4,8). Et en effet, Dieu répond à Elie, il s’approche de lui.

Nous imaginons, et donc désirons, l’imagination c’est, je dirai, le débordement du désir, nous imaginons que l’approche de Dieu se fasse dans la douceur, comme sur un pré fleuri, au son d’une mélodie céleste à la suavité exquise. Or il n’en est rien : l’approche de Dieu se réalise au prix de la réaction des éléments de la nature : ouragan, tremblement de terre, feu, mer en furie, pour les Apôtres.

Pourquoi ce soulèvement des éléments de la nature ? Eh bien, je crois qu’il ne faut pas oublier que, depuis le péché des anges, « Satan et les démons ont été précipités sur la terre », comme nous le dit l’Apocalypse (12,9). Ils ont colonisé la terre, l’air, l’eau, le feu, le monde des morts, et cela les exorcistes le savent fort bien. Eh bien sûr, tous ces démons réagissent à l’approche de Dieu. D’où tous ces soubresauts des forces de la nature qui leur est soumise.

De même, dans notre évangile, la barque des disciples est secouée par les flots de la mer, pendant que Jésus est en prière.

Dans la bible, la mer est le symbole des forces du mal. Y habite Léviathan, le monstre marin.

A la prière et à l’approche de Jésus, les forces du mal se déchaînent.- Et lorsque Saint Matthieu relate que Jésus marche sur les flots en furie, c’est pour nous dire qu’il domine les puissances du mal.

Dès les premiers temps de l’Église, les Pères de l’Église ont vu dans la barque des disciples une image de l’Église. Cette Église, envoyée de par le monde par Jésus, est de plus en plus chahutée par les éléments du monde, car Jésus approche.

Jésus vient « vers la fin de la nuit », littéralement, si on traduisait exactement, Jésus vient « à la quatrième veille ». A la manière antique qui comptait le temps, la quatrième veille se situe entre 3h et 6 h du matin, donc vraiment, effectivement à la fin de la nuit.

Cette quatrième veille nous rappelle l’invitation pressante que Jésus nous a lancée bien des fois dans l’évangile : « Veillez ». Et c’est dans la prière que le chrétien veille. Ainsi la prière de Jésus, prière de Jésus sur la montagne, prière de Jésus qui se continue encore. Depuis son ascension, « Jésus est toujours vivant pour intercéder en notre faveur », nous dit la lettre aux Hébreux (7,25). Et donc, ainsi la prière de Jésus et la prière de l’Église doivent-elles se rejoindre pour que soient dominées les forces du mal.

Dans cette approche de Jésus et ce déchaînement des forces du mal, deux injonctions nous sont données par Jésus : ne pas avoir peur et ne pas douter.

-Ne pas avoir peur, car le démon cherche toujours à nous impressionner par les forces de la nature qu’il utilise. Le démon nous rend captifs par la peur, c’est encore la lettre aux Hébreux qui nous le dit. Or Jésus est là, il approche, il veille, il est vainqueur, donc nous n’avons aucune raison d’avoir peur. Voyez comment depuis des mois maintenant les médias « main-stream » diffusent le virus de la peur. Et ils réussissent ! Aujourd’hui, tout le monde se méfie de tout le monde, c’est bien le jeu du diviseur qui veut nous isoler !

-Deuxième injonction de Jésus, c’est de ne pas douter ; et pour cela fixer plus que jamais son regard sur Jésus, c’est-à-dire prier, lire la Parole de Dieu chaque jour, adorer. Pierre a douté lorsqu’il s’est laissé impressionner par la furie des flots plutôt que de rester le regard fixé sur Jésus.

Et notre combat d’aujourd’hui est bien celui-ci : rester les yeux fixés sur Jésus. Alors, il se fera un grand calme pour nous comme ce fut le cas pour les disciples et pour Elie.

Comme se fut le cas pour les habitants de Pontmain, le 17 janvier 1871. Alors qu’ils étaient dans la peur, après, on aurait bien pu leur annoncer que les Prussiens étaient aux portes de Pontmain, ils déclarent : « Nous n’aurions pas peur ».

Eh bien, que ce temps de vacances soit pour nous l’occasion de remettre Jésus à la première place dans nos vies, et que la Vierge Marie, que nous fêterons dans son Assomption samedi, eh bien, nous prépare à la venue en gloire de son Fils, elle qui a Pontmain nous montre ce Fils, et nous le tend. Amen.