21e Dimanche du Temps Ordinaire (A) 2023

27 août 2023

  • Frère Philippe-Marie VAGANAY Frère Philippe-Marie VAGANAY

Introduction : Dans notre communauté canoniale, nous ne pouvons pas ne pas évoquer Sainte Monique, la mère de Saint Augustin, dont c’est la fête aujourd’hui. Donc nous souhaitons une bonne fête à toutes celles qui sont placées sous son patronage, s’il y en a dans l’assemblée ou parmi les personnes qui nous suivent par les réseaux sociaux. Monique qui écoutait la voix du Seigneur et qui a répondu.

Nous aussi, nous sommes invités à écouter la voix du Seigneur, c’est ce que nous chantions, pour répondre. Et quelle est cette réponse, sinon la réponse de la foi, notre acte de foi, notre adhésion à Dieu qui se révèle.

Demandons cette grâce de la foi, une foi toujours plus solide, toujours plus ferme. Préparons-nous à célébrer le mystère de l’Eucharistie en reconnaissant que nous avons péché, que bien souvent, ce n’est pas la foi qui mène nos actes, mais notre pauvre nature livrée à elle-même.

Homélie : L’Evangile de ce jour, nous apporte une triple révélation : révélation sur qui est Jésus, révélation sur qui est Pierre et révélation sur qui est l’Église.

Qui est Jésus ? L’événement se situe à Césarée-de-Philippe, c’est-à-dire à l’extrémité nord d’Israël, près des sources du Jourdain, à la frontière avec le Liban. Jésus choisit ce lieu, loin des foules, pour éviter tout risque d’agitation messianique, car ce qu’attendait les gens, c’était un Messie politique, qui redonnerait à Israël son indépendance et sa liberté. Or, si Jésus est bien un Messie, c’est dans un tout autre sens.

Lorsque les disciples répondent à la question : « Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ? », il se dégage tout de suite un consensus, à travers la diversité des réponses : Jésus n’est pas un « homme ordinaire », mais il est perçu comme un homme de Dieu exceptionnel, comme un prophète.

Mais cela ne suffit pas pour connaître l’identité profonde de Jésus. D’où sa deuxième question : « Pour vous, qui suis-je ? » Pour vous, qui avez cheminé avec moi, qui avez fait des expériences avec moi, qui suis-je ?

Et c’est alors que la réponse fuse de la bouche de Simon-Pierre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » Chacun des quatre mots est important : Jésus n’est pas seulement un Messie ; il est Le Messie ; il est LE FILS, de DIEU, du VIVANT ! Jésus est le Messie, mais pour apporter la Vie, la Vie Divine. Cela a une portée beaucoup plus vaste que la libération d’Israël du joug romain !

C’est alors que Jésus fait prendre conscience à Simon que cette affirmation de foi qu’il vient de déclarer, ne vient pas de lui, mais que c’est une révélation qui lui vient de Dieu, du Père. Il n’est pas besoin de visions ou de signes extraordinaires pour que Dieu se révèle, pour que Dieu parle au cœur de l’homme et l’enseigne en vérité.

« Ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela. » La chair et le sang, belle expression archaïque qui évoque la faiblesse naturelle de l’homme.  L’homme ne peut pas par lui-même accéder aux réalités divines ; il faut une « révélation », une lumière qui vient de Dieu. L’intelligence humaine est radicalement incapable de dire qui est Dieu. Il faut que Dieu lui-même le lui révèle. La foi, qui nous permet de connaître qui est Dieu, sera toujours un don de Dieu et non le résultat de nos déductions, de notre logique.

Mais à la révélation de qui est Jésus succède celle de qui est Pierre. Car si Jésus change le nom de Simon en celui de Pierre, c’est bien parce que Simon-Pierre devient une réalité surnaturelle, ce qui suppose, là encore, une révélation. Comme dans notre première lecture, Jésus emploie des images simples et parlantes pour exprimer le charisme de Pierre qui sera un charisme d’autorité.

Le pouvoir d’Éliakim, le nouveau premier ministre du roi Ézéchias, était exprimé par les symboles de la tunique, de l’écharpe, de l’épaule (symbole de force), de la clef, de la cheville plantée dans un endroit solide. Tout cela évoque la noblesse et la solidité.

Jésus emploie les images de la pierre, du roc, de l’Église, des portes, des clefs (là aussi) et l’image de lier et délier. Là encore, ce sont des images qui expriment l’autorité, la solidité. De très nombreuses fois dans la Bible, Dieu est désigné comme le Rocher d’Israël. On peut s’appuyer sur lui, il ne bronchera pas. C’est désormais le charisme de Pierre.

Les clefs : elles sont le symbole du pouvoir, celui qui détient les clefs d’une maison a tout pouvoir sur cette maison.

Lier et délier : Éliakim avait reçu le pouvoir de fermer et d’ouvrir, cela préparait le pouvoir confié à Pierre de lier et de délier. Ce pouvoir manifeste l’intention de Jésus de faire de Pierre son plénipotentiaire, dont les actes seront ratifiés par Dieu. Et ce charisme de Pierre se transmet à tous ses successeurs, dans l’ordre de la foi et de la morale.

Après les révélations concernant Jésus et Pierre, vient la révélation concernant l’Église. Qui est l’Église ? « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Église ». Le mot « Église » traduit le mot hébreu « qahal » qui signifie « assemblée », une assemblée que Dieu convoque. Ce que Jésus veut bâtir, c’est donc une « assemblée, une « communauté ».

Autrement dit, il est impossible d’être chrétien tout seul. Par voie de conséquence la non réponse aux convocations du Seigneur, c’est-à-dire la non-participation aux assemblées dominicales, entraîne l’atrophie et la mort de la foi, car l’Église est la communauté de ceux qui font leur la profession solennelle de Pierre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » Ce qui veut dire qu’on ne peut séparer le Christ, Pierre et l’Église. Les trois marchent ensemble. Dire : « le Christ, oui, et l’Église, non », ça n’a aucun sens. Il faut le Christ, Pierre et l’Église.

Remarquons encore que Jésus parle de son Église. Souvent, aujourd’hui, nous entendons des Catholiques parler de leur Église. On entend souvent cette expression : « J’ai mal à mon Église ! » Mais l’Église n’est pas mon Église, c’est l’Église de Jésus. L’Église ne m’appartient pas, c’est moi qui appartiens à l’Église. L’Église n’est même pas l’Église de Pierre, ce n’est pas l’Église du Pape ! c’est l’Église de Jésus. Il faut être attentif à cela, sinon on risque de quitter l’Église, si tel Pape ne nous plait pas. Et on se fait, finalement, le centre et la référence de ce que doit être l’Église.

Le dernier symbole qu’emploie Jésus est celui de la porte : « Je bâtirai mon Église et la puissance de la mort ne l’emportera pas sur elle ». Le grec dit littéralement : « et les portes des enfers n’auront pas de force contre elle ». Jésus annonce par là, non seulement que l’Église devra endurer les attaques de l’ennemi, mais aussi, il annonce la victoire finale de l’Église : les portes de la mort seront brisées par l’Église, comme nous le voyons représenté dans les icônes de la Résurrection.

Le but de l’Église est bien cela : sauver, faire entrer dans la vie. Dans l’icône de la Résurrection, on voit justement les portes de la mort qui sont brisées et même qui sont mises en forme de croix. Le but de l’Église, c’est de faire entrer dans la Vie. Jésus a vraiment voulu cela : une « assemblée » de « ressuscités », avec lui !

La mort est entrée dans le monde par le doute. La vie ne peut revenir que par notre confession de la foi de Pierre, par notre confession de la foi de l’Église : « Tu es le Christ, le Fils, le Dieu, du Vivant ».

Faisons notre cette confession de foi pour que l’Église et notre humanité entrent, avec le Christ, dans la Vie.

AMEN.