21e DIMANCHE Du Temps Ordinaire (B)

22 août 2021

  • Frère Marie-Jean BONNET Frère Marie-Jean BONNET

Introduction : « Toi seul, Seigneur, nous parles de la vie et nous la donne. » C’est ce que nous venons vivre justement maintenant : recevoir ces paroles qui ouvrent à la Vie éternelle, qui ouvrent à l’espérance d’une vie sans fin et d’une vie en plénitude et recevoir la Vie même de Dieu.
Rendons grâce déjà pour ce don immense, pour le don de la Foi. Quel cadeau ! Il faudrait remercier tous les jours pour le cadeau de la Foi. Ça change tout, quand même ! Ça change tout. Ça ouvre des perspectives quand on a la Foi. La Foi est un cadeau gratuit dont il faut s’émerveiller, dont il faut remercier et qu’il faut demander aussi, la grâce d’être fortifié, de grandir dans la Foi.
Aujourd’hui, justement, se rassemblent, non loin d’ici, au Bourgneuf-la-Forêt, 75 étudiants, qui sont avec le Frère Prieur. Prions pour eux, pour que – c’est quand même un cap, c’est particulièrement important que cette jeunesse- pour choisir, se déterminer pour le Christ. Ce sont des années décisives. Prions pour eux, pour qu’ils puissent découvrir, rencontrer le Christ, Vérité et Vie.
Et nous-mêmes, rentrons dans cette rencontre qui nous sauve en nous reconnaissant pécheurs.

 

Homélie : Fidélité. C’est un mot qui a une résonance particulière pour nous en Mayenne, grâce à notre radio chrétienne locale qui a choisi précisément ce nom de « Fidélité-Mayenne ». Je m’en réjouis. J’en profite pour remercier tous les acteurs de cette radio, pour ce service précieux oh oui, précieux, service de l’Évangile, de l’Église et de la culture.
Fidélité. C’est le mot qui me semble mot-phare de nos lectures de ce dimanche.
Dans la première lecture, en effet, Josué « fils spirituel de Moïse », arrive au terme de sa vie terrestre. Témoignant d’une fidélité sans faille à Dieu et à Moïse, il a bien rempli sa mission de conduire le peuple d’Israël jusqu’en Terre Promise, afin que les 12 tribus s’y installent, chacune sur son territoire, mais unies par une expérience et une foi communes en un Dieu libérateur et protecteur.
Mais Josué sait que, mêlés – il a fait l’expérience du désert et de la fluctuation de ce peuple, la versatilité de ce peuple. Josué sait que mêlés aux populations païennes du pays, vivant désormais dans la prospérité – ce pays qui ruisselle, qui était promis comme ruisselant de lait et de miel – vivant désormais dans la prospérité et dispersés sur la Terre Promise, les Israélites risquent d’oublier le Seigneur, d’être séduits par l’idolâtrie environnante, et même de se diviser entre eux.
Voilà pourquoi, avant de mourir, il convoque toutes les tribus à Sichem, un lieu symbolique fort dans l’histoire d’Israël ; ceci, pour y faire mémoire des hauts faits de Dieu en faveur de son peuple, et sceller, fortifier l’unité des 12 tribus en renouvelant leur engagement à être fidèles au Dieu qui les a sauvés.
Un récit qui aura fonction, par la suite donc, d’exemplarité et d’exhortation à la conversion à l’adresse des générations suivantes, tant de fois infidèles au Seigneur et à son Alliance, et recueillant alors les fruits amers de ces infidélités.
Sommes-nous aujourd’hui, malgré les apparences immédiates, dans un contexte si différent de celui du peuple d’Israël à cette époque ? Société d’abondance et de gaspillage, y compris dans les mesures sanitaires, soit dit en passant, contexte social areligieux et parfois irréligieux et conséquemment idolâtre. – car le cœur humain est fait pour le plus grand, le plus haut et, quand c’est Dieu qui ne l’habite pas, il se tourne vers les idoles qu’il crée lui-même. Divisions sociales jusque dans l’Église…
La Parole de Dieu de ce jour nous invite à un regard lucide sur ces menaces et à rechoisir à qui nous donnons notre foi, notre fidélité.
Fidélité. L’Évangile, quant à lui, est la fin du discours de Jésus sur le Pain de Vie.
Là encore, c’est l’heure du choix, d’un choix décisif : peut-on encore donner sa foi à ce Jésus qui tient des propos inaudibles, choquants, scandaleux ? Peut-on donner sa foi à ce Jésus ou faut-il le lâcher ? Choix décisif parce qu’il sera un tournant, de fait, et pour Jésus et l’annonce de sa Passion, où tant vont le lâcher, et pour ceux qui le suivaient. Beaucoup, nous dit Saint Jean, cesseront alors de le suivre. Beaucoup. Et Jésus ne les racole pas. Jésus ne les racole pas car lui, il respecte parfaitement la liberté des personnes. Il va même jusqu’à placer ses Douze choisis devant leur propre liberté : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » Dieu est prêt à tout et, de fait, Il aura bien des déceptions aussi sur ses Douze.
Pierre, en ce moment-là éclairé par l’Esprit-Saint, donne la réponse de foi, de la foi : « Nous savons que tu es le Saint de Dieu », celui qu’Il a consacré et envoyé. C’est cela que cela veut dire. Nous le savons parce que tu as des paroles qui donnent Vie. Plusieurs fois, dans l’Évangile, nous voyons que les foules étaient scotchées, comme on dirait, à écouter : « Jamais homme n’a parlé comme cet homme. » Tes paroles ont autorité.
Tu as les paroles qui donnent Vie, des paroles qui illuminent, qui libèrent, qui fortifient, et qui nous ouvrent à une vie éternelle avec Toi. Nous savons que Tu es le Saint de Dieu parce que nous sommes témoins de tes actes de délivrance, de guérison, et de pardon.
Pierre a-t-il bien saisi le mystère du Pain de Vie que Jésus annonçait alors ? Sans doute pas. Mais la foi est avant tout confiance en la Personne de Jésus. Et c’est ça sur quoi s’appuie Pierre. Ce n’est pas qu’il a tout bien compris de ce que disait Jésus, non, il devait être bien perplexe, lui aussi, bien chamboulé dans son mental, mais il savait qui était Jésus. Oui, il en avait fait l’expérience.
La foi est avant tout confiance en la Personne de Jésus et conséquemment en ses paroles. Quand on a confiance en une personne, vraiment et profondément, même quand les paroles ne sont pas tout de suite compréhensibles, on lui fait confiance.
Oui, la Personne de Jésus, en ses paroles, mêmes lorsqu’elles nous dépassent totalement et même nous dérangent. Nous aussi, nous savons bien que ses paroles à Lui, Jésus, que nous lisons dans l’Évangile, nous débordent toujours, nous bousculent, nous dérangent même, lorsqu’elles mettent en lumière ce qui est à convertir en nous.
Comme l’écrit Marie-Noëlle Thabut : « La Foi n’est pas un bagage », une fois pour toutes, c’est « un chemin, sur lequel il faut se laisser guider » ; et Jésus nous rappelle encore ici que ce chemin est un Don à désirer, à recevoir humblement du Père céleste : « Personne ne peut venir à moi, dit Jésus, si cela ne lui est pas donné par le Père. »
Quand ma foi est secouée par les évènements de ma vie et de la vie du monde, est-ce que je sais, comme Pierre, faire mémoire de mon chemin de foi ? Des grâces dont j’ai été témoin pour moi et pour les autres ? Des paroles du Christ et de son Église qui m’ont redonné Vie ?
Saint Paul lui aussi nous parle de fidélité : fidélité conjugale.
Elle consiste, nous le savons bien, à être et agir de telle sorte que le conjoint puisse garder confiance en l’autre et par suite continuer à s’appuyer sur lui. C’est ça la foi : s’appuyer sur.
« Frères, soyez soumis les uns aux autres », dit l’apôtre. Et je renvoie, je vais le développer, et je renvoie à Amoris Laetitia, n°156, que j’ai relu ce matin. C’est l’explication la plus claire et la plus actuelle, pertinente pour aujourd’hui de ce passage qui est difficile, reconnaissons-le, chez Saint Paul. Mais, en substance, il s’agit de ceci. Il ne s’agit pas, bien sûr, d’une soumission d’esclave, mais de se mettre en dessous : sou-mission, se mettre en dessous pour soutenir, de s’abaisser pour servir, à l’exemple du Christ aux pieds de ses apôtres le soir du Jeudi Saint. C’est bien l’amour fidèle du Christ pour nous justement, que Saint Paul offre en exemple aux époux, lui qui a aimé les siens jusqu’à la fin et jusqu’à l’extrême – c’est les deux traductions possibles du mot de Saint Jean : « Ayant aimé les siens, il les aima jusqu’au bout, jusqu’à la fin et jusqu’à l’extrême. »
La Fidélité, c’est l’amour durable pour lequel nous sommes faits, c’est l’écologie de l’amour ; fidélité au Seigneur, à son Église, à son conjoint, à sa famille, à sa Communauté, à la parole donnée, à ses promesses – Promesse Scoute, en particulier, ne l’oublions pas – et engagements divers et nombreux. Oui, elle est possible la fidélité. Elle est possible et heureuse, mais seulement lorsqu’elle s’appuie sans cesse, sans cesse sur la fidélité de Dieu qui elle ne faillit jamais. Dieu est fidèle. C’est un leitmotiv dans la bouche de Saint Paul qui a fait l’expérience de cette fidélité miséricordieuse de Dieu envers lui.
Je rappelle quelques passages de Saint Paul :
« Celui qui vous appelle est fidèle, et il fera tout cela » (1 Thessaloniciens 5, 24), tout ce que Saint Paul annonce.
« Dieu est fidèle, lui qui vous a appelés à vivre en communion avec son Fils, Jésus-Christ notre Seigneur. » dans la première lettre aux Corinthiens (1, 9).
« Dieu est fidèle, et il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces. » Il sait ce que c’est que le combat, Saint Paul, les tentations. « Dieu est fidèle, et il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces, mais avec la tentation il vous donnera aussi le moyen d’en sortir, et la force de la supporter. » (1 Corinthiens 10, 13)
Et enfin, dans la lettre aux Hébreux : « Tenons fermement l’espérance que nous proclamons, car Il est fidèle Celui qui a promis. » (Hébreux 10, 23)
En ce 22 Août où l’Église fait, discrètement aujourd’hui à cause du dimanche, mémoire de Marie, Reine, c’est-à-dire associée parfaitement à la royauté de son Fils, et ceci parce qu’elle a été parfaitement fidèle. Dieu a pu s’appuyer sur elle, parfaitement, pour l’œuvre du salut des hommes. Merveille ! Une créature, comme nous, mais parfaitement fidèle. Alors demandons-lui, à Marie, notre Mère et notre Reine, « plus Mère que Reine » disait Thérèse, mais les deux, c’est-à-dire qu’elle est Mère et donc elle est pleine de tendresse et de bonté pour nous, elle est Reine, ça veut dire qu’elle est puissante. Demandons-lui à cette Mère et à cette Reine de nous obtenir la grâce, cette grâce d’une fidélité toujours plus grande. Amen.