5e DIMANCHE du Temps Ordinaire (A) 2023

5 février 2023

  • Frère Marie-Jean BONNET Frère Marie-Jean BONNET

INTRODUCTION : Nous sommes heureux d’accueillir les jeunes de l’aumônerie des collèges et lycées de la paroisse de Betton en Ille et Vilaine avec leurs accompagnateurs, en particulier Hubert Rime, qui a été ordonné diacre à l’automne. Alors prions pour eux, pour vous, chers jeunes, et pour que chacun d’entre nous soit vivifié par cette célébration, qui est rencontre avec l’Esprit de vie, avec Jésus qui nous donne justement sans cesse, qui nous offre son Esprit de Vie, vivifiant, pour accomplir les œuvres du Père.
Eh bien, oui, entrons dans cette Eucharistie qui nous sauve de nos péchés, nos péchés qui nous replient sur nous, qui empêchent cette vie de Dieu de jaillir en nous. Demandons sa Miséricorde d’abord, en nous préparant justement à l’écouter et à le recevoir.

 

HOMÉLIE : Jésus n’a pas dit vous êtes des lumières, mais « vous êtes la Lumière », signifiant par là cette unité de cette Lumière que nous avons à vivre, à être.
La fête de la Présentation de Jésus au temple que nous avons célébrée la semaine passée, jeudi 2 février, est appelée par nos frères nos chrétiens d’Orient, les chrétiens d’Orient, « fête de la Rencontre », rencontre entre le Messie et son peuple, et aussi « fête des Lumières », à juste titre, puisque nous y portons donc des cierges, des lumières. Ces lumières, elles nous viennent du Christ qui dira un jour : « Je suis la Lumière du monde », le Christ prophétisé comme la lumière des nations par ce vieillard Siméon qui L’accueille dans ses bras, Lumière du Christ destinée à éclairer tout homme, comme le dit Saint Jean au seuil de son Évangile.
Quoi d’étonnant alors que le Christ déclare à ses disciples, rassemblés comme nous ce matin autour de Lui pour accueillir sa Parole : « Vous êtes la Lumière du monde », et aussi, « Vous êtes le sel de la terre ». Et l’audace de la part de Jésus de donner ainsi comme horizon aux disciples la terre entière : « Vous êtes le sel de la terre », « Lumière du monde ». Déjà leur dire qu’être disciple implique d’être aussi missionnaire, indissociable. Nous sommes habitués maintenant à l’expression « disciple-missionnaire ».
Nous nous demandons peut-être comment être missionnaire, ou comment l’être davantage, parce que je pense que l’on est toujours en dette effectivement d’un cœur missionnaire, toujours. On sent que ce qui brûlait le cœur de Jésus : « Je suis venu allumer un feu sur la terre, comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! » Eh bien, ça, est-ce que ça nous brûle, nous ? Voilà donc nous avons à demander d’avoir ce cœur déjà missionnaire.
Demandons comment être missionnaire. Eh bien, les lectures de ce jour nous offrent des réponses :
L’Évangile nous dit qu’être missionnaires c’est être des révélateurs.
La première lecture et le psaume nous disent que c’est notre vie, nos actes concrets qui sont révélateurs,
et la lettre de Saint Paul nous appelle à vivre la mission dans l’humilité.
« Vous êtes le sel, vous êtes la lumière du monde ».
Saint Matthieu est le seul à rapprocher ces deux images qui, dans les autres évangélistes synoptiques Marc et Luc sont à des endroits différents. Alors, cela nous invite à se demander si ces deux images ont quelque chose de commun. Le sel et la lumière ont en commun de révéler autre chose qu’eux-mêmes. Le sel met en valeur la saveur des aliments, le savent ceux qui sont condamnés à un régime sans sel.
La lumière révèle l’existence, la variété et la beauté des êtres qui nous entourent. Voilà, quand il fait nuit noire, on ne voit plus rien et c’est très triste. La lumière ça change tout, nous en savons quelque chose quand le ciel comme ce matin se dégage enfin. Bon, ça fait du bien spontanément. Nous sommes faits pour la lumière.
Être le sel de la terre c’est donc révéler aux hommes la saveur profonde de la vie.
Je viens d’apprendre, chers jeunes, que votre thème de réflexion, ce week-end, c’est : « Je suis une merveille de Dieu », et c’est vrai. Nous ne sommes pas forcément tous des lumières, mais nous sommes tous des merveilles de Dieu, ça c’est sûr. Il nous a voulus, chacun, personnellement, de toute éternité. Ça doit nous donner un vertige de soi, et nous sommes tous des merveilles de Dieu.
Alors révéler aux hommes la saveur profonde de la vie, de leur vie, quelle qu’elle soit. Tant d’êtres humains aujourd’hui, nous en avons des échos, hélas, autour de nous, parfois si proches, tant d’êtres humains aujourd’hui ont perdu le goût de vivre, et en viennent parfois à des actes de désespérance.
Oui, nous avons cette mission de révéler aux hommes la saveur de leur vie, leur révéler aussi Celui qui nous donne justement, nous, chrétiens, qui sommes des surprivilégiés, Celui qui nous donne et nous redonne sans cesse le goût de vivre, car nous ne sommes pas épargnés non plus par les épreuves, les combats, les difficultés dans nos vies concrètes, Lui qui nous donne la force et le goût de vivre en dépit de toutes les circonstances et les évènements difficiles que nous connaissons tous. Alors, révéler aux hommes Celui qui agit, aussi déjà à travers eux, même quand ils ne le savent pas, dans tout acte d’amour véritable, puisque comme l’Église le chante depuis les premiers siècles : « Où sont amour et charité Dieu est présent ».
Être lumière du monde, c’est révéler aux hommes le sens et la beauté de ce monde au-delà de toutes ces ténèbres, et Dieu sait si elles sont épaisses aussi, mais pourtant, comme le disait Thérèse de Lisieux : « Je crois, je sais, je crois qu’au-delà des plus épais nuages, le soleil continue à briller. » C’est ça la foi. C’est aussi croire qu’au-delà de toutes les ténèbres de ce monde, continue à briller Celui qui est la Lumière du monde, oui, le révéler au-delà de toutes les ténèbres du monde le vrai visage des personnes et des choses.
La première lecture et le psaume nous disent justement comment être lumière. Il ne s’agit pas tant d’éclairer par nos paroles, certains ont la mission de parler un peu plus que d’autres, et je pense que dans toute vie il y a des occasions où le Seigneur nous appelle à témoigner aussi par notre parole, sans rougir de notre foi au milieu de ce monde si incrédule souvent, mais il ne s’agit pourtant pas tant d’éclairer par nos paroles que par nos actes, par notre vie, c’est ce que nous a dit en long et en large la première lecture d’Isaïe. Vous savez bien que les prophètes nous ramènent toujours à la vie concrète. Attention disent les prophètes au peuple d’Israël, et donc à nous, ce n’est pas multiplier les actes de culte qui plaisent à Dieu, c’est la vie concrète. Les actes de culte très bien, mais il faut qu’ils transforment ta vie concrète, « Partage… accueille… couvre…, ne te dérobe pas à ton semblable. Alors ta lumière jaillira comme l’aurore… »
Non seulement aussi faire le bien mais éviter le mal : « Si tu fais disparaitre la parole malfaisante… », aïe ! Je pense qu’on peut faire tous notre « mea culpa », c’est-à-dire notre examen de conscience, des paroles malfaisantes, nous en sommes si souvent capables ; « Ta lumière se lèvera dans les ténèbres, la gloire du Seigneur fermera la marche », dit la nouvelle traduction. On peut comprendre t’accompagnera, ce qui veut dire ta vie révèlera ta présence ; la gloire c’est le rayonnement d’une présence. « La gloire du Seigneur t’accompagnera, ta vie révèlera sa présence ».
Car ce que le Seigneur nous demande dans tous ces actes de bonté, d’attention, de justice n’est rien d’autre que ce qu’Il fait pour nous. Le Seigneur est, nous le savons bien, ce Père qui sans cesse nous fait du bien, nous relève, nous soigne, nous vivifie, nous protège. Donc Il nous demande d’être à son image, de révéler sa présence en nous par nos actes, par notre vie transformée.
Et puis, être missionnaire, donc c’est révéler la présence du Dieu de vie, et de cette merveille que nous sommes. Oui chacun, même s’il a du mal à y croire, peut révéler la beauté de sa vie, de toute vie, mais tout cela dans l’humilité, non pas en comptant sur nos moyens humains, en ne comptant surtout sur nos moyens humains, mais en comptant sur la Grâce de Dieu.
Saint Paul quand il écrit à ses Corinthiens avait essuyé, vous vous souvenez, on en avait parlé dimanche dernier, avait essuyé un cuisant échec auprès des Athéniens qui étaient l’élite intellectuelle de la Grèce de l’époque, et il avait bien huilé sa prédication, et peut-être comptait-il un peu trop sur justement sa rhétorique, c’est-à-dire sa pastorale habile pour capter, pour conquérir le cœur de ces Athéniens. Ça a été un four et donc, à part quelques-uns quand même qui l’ont écouté, suivi, donc Saint Paul a compris que ce n’était pas tellement en comptant sur ses moyens humains, même s’il faut se former, ce que vous faites, n’est-ce pas, prendre du temps pour comprendre sa foi, pour l’aimer, pour en comprendre la cohérence, pour en comprendre la beauté, et pour ensuite pouvoir en parler avec justesse. Bien sûr, tout cela est important, mais pourtant, nous savons bien que l’acteur principal de l’évangélisation ce n’est pas nous, c’est l’Esprit Saint, et il faut compter sur Lui.
Et Saint Paul, eh bien, à l’issue de cette expérience douloureuse d’Athènes, eh bien, dit que c’est dans la faiblesse, « tout craintif et tout tremblant », qu’il est venu apporter aux Corinthiens, eh bien, l’Évangile, mais il a misé sur l’Esprit Saint et non pas sur lui : « Mon langage, ma prédication, n’avait rien du langage qui veut convaincre,- mais voilà, il était- l’expression de la puissance de l’Esprit ». Et de fait, l’Esprit Saint va se manifester par bien des dons, des charismes variés dans cette Église bouillonnante de Corinthe, Église de petits, de pauvres, mais qui se sont ouverts justement à l’Esprit Saint, parce que Saint Paul justement est allé les rencontrer, fort de cette puissance de l’Esprit, et non pas de ses propres forces.
Eh bien, pour nous aussi nous ne serons sel et lumière que si nous sommes pauvres de cœur, comme nous le rappelait les Béatitudes dimanche dernier. Ne comptons pas sur nous-mêmes, mais sur la Grâce de l’Esprit. Il ne s’agit pas tant de convaincre, encore moins de conquérir, que de donner à voir la présence de Dieu dans nos actes, dans nos actes, voilà, qui tranchent, qui doivent être lumière, qui doivent poser question. Nous savons bien que, quand des hommes et des femmes font preuve d’une grande générosité, cela suscite en nous de l’émerveillement et cela nous provoque à nous dépasser, nous remettre en question.
Oui, donner, il ne s’agit pas tant de donner que de donner à voir. En voyant ce que vous faites, ce que vous faites de bien, les hommes rendront gloire à Dieu c’est-à-dire que dans leur cœur va s’éveiller le désir peut-être d’imiter. Il s’agit d’éveiller, de donner le goût, le désir d’une vie avec Jésus, en Jésus, mais comment donner le goût de cette vie en Jésus sinon par un rayonnement de joie sur tout ? Le Pape nous invite sans cesse à cette joie spirituelle, à aller vérifier que nous sommes des chrétiens joyeux, heureux d’être chrétiens. Alors, nous pouvons nous poser la question : Est-ce que dans notre vie concrète, de tous les jours, nous rayonnons la joie d’être chrétiens ?
Eh bien, demandons cette grâce au Seigneur, les uns pour les autres, la joie qui est le fruit de l’Esprit Saint. AMEN.