LA TRÈS SAINTE TRINITÉ (C) 2022.06.12

12 juin 2022

  • Frère Philippe-Marie VAGANAY Frère Philippe-Marie VAGANAY

INTRODUCTION : Bienvenue aux jeunes pros de la Roche-sur-Yon venus accompagnés par le Père Philippe-Marie (du diocèse de la Roche-sur-Yon). Voilà, nous nous entendons bien, voyez.
A travers le signe de Croix que nous venons de tracer sur notre corps, à travers la Salutation, par deux fois nous avons confessé le Père, le Fils et le Saint Esprit, un seul Dieu, mais triple débordement de Lui-même, de son Amour sur tout l’univers et sur chacun de nos cœurs, et c’est ce Dieu débordant que nous célébrons, que nous confessons, que nous fêtons aujourd’hui.
Face à ce débordement d’Amour, nos pauvres vies paraissent bien ternes, bien entachées de non-amour, et au début de cette célébration, c’est précisément ce non-amour que sont nos péchés que nous venons confesser pour qu’Il les prenne et les fasse disparaître dans son Amour à Lui, et qui nous embrase.
Alors au seuil de cette célébration du mystère de l’Eucharistie, reconnaissons que nous avons péché.

HOMÉLIE : La Bible ne prononce pas une seule fois le mot abstrait de Trinité qui a été forgé par la théologie pour exprimer ce triple débordement du Dieu unique. La Trinité n’est pas d’abord une vérité abstraite, un article du Credo à croire. La Trinité est un fleuve d’Amour en plein débordement, et qui déborde jusqu’à l’homme depuis le jour de la Création, depuis l’acte du Calvaire, Amour répandu sur toute l’humanité depuis le matin de la Pentecôte.
L’Ancien Testament avait déjà discerné cette magnificence de Dieu, sa richesse débordante. Nous en avons un exemple dans notre première lecture : dans le Livre des Proverbes, avant que le monde n’existât, Dieu est présenté comme débordant, comme un fleuve débordant de Sagesse. Le mot « sagesse » vient du mot « saveur ». La Sagesse c’est ce qui a de la saveur, ce qui donne à la vie sa saveur. Dieu est plein de saveur, il donne goût à tout ce qu’Il touche. Tout ce que fait Dieu est fait avec goût.
Dans notre texte, nous pouvons remarquer que la sagesse parle à la première personne, comme si elle était quelqu’un : « Avant les siècles, J’ai été formé. Quand les abîmes n’existaient pas encore je fus enfantée… » Et la Sagesse joue avec Dieu, elle joue avec les hommes comme un petit enfant.
Saint Jean et Saint Paul s’inspireront de ces intuitions de l’écrivain sacré pour établir leur théologie du Christ et de l’Esprit Saint. Jésus est la Sagesse en personne, dira Saint Paul. Mais comme Dieu est aussi Esprit, Sagesse et Esprit sont une même réalité. L’Esprit est Esprit de Sagesse. Ainsi le Verbe et l’Esprit « jouent en présence de Dieu, trouvant leurs délices avec les fils des hommes ». Nous voyons donc dans cette Sagesse qui parle à la première personne une intuition et une annonce de l’Incarnation et de la Pentecôte. Sagesse qui vient rejoindre l’homme en se faisant chair. Le Verbe s’est fait chair, et cette Sagesse qui se répand dans toute l’humanité, dans tout l’univers depuis le jour de la Pentecôte par l’Esprit Saint.
Pour Saint Paul, ce mystère de Dieu est encore et avant tout un mystère d’Amour débordant. « L’Amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné », avons-nous entendu. Cet amour de Dieu est constant ; rien ne le rebute, mais il féconde tout. Même nos situations de détresse, dit Saint Paul, sont l’occasion d’un débordement de l’Amour divin. Le verbe grec, traduit par « répandu », évoque un fleuve en pleine crue, apportant le limon fécondant sur les rives et faisant tout reverdir. Ce qui veut dire que Dieu n’est pas chiche en Amour : Il ne mesure pas son Amour, Il le répand à pleins flots, – La preuve nous en est donnée sur le Calvaire : une cascade d’Amour a jailli du côté ouvert de Jésus. Et c’est l’Esprit qui le communique à l’Église et à chaque baptisé.- Le Baptême nous plonge dans l’Amour du Père, et du Fils, et du Saint Esprit.
Cette réalité est une affaire d’expérience, et d’expérience progressive : « J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter » dit Jésus. Jésus, à la veille de sa mort, n’a pas pu tout dire à ses apôtres. Dans le mystère même de la foi, on ne peut entrer que progressivement. La foi est une « progression ». C’est une vie qui se développe. Il y a toujours des choses nouvelles à découvrir en Dieu. La foi n’est pas d’abord un corps de doctrine, elle est d’abord une relation ; comme dans le développement d’une relation d’amour avec quelqu’un, fiancés, époux, amis…
Comme les apôtres, je ne suis moi aussi qu’au début d’une découverte, d’une aventure, d’une rencontre. Il y a pour moi aussi bien des choses que l’Esprit de Vérité veut me révéler pour me conduire dans la Vérité toute entière. Encore faut-il que j’entretienne fidèlement une relation d’amour avec Lui, que je reste à son écoute. Il nous faut apprendre à cheminer au rythme de sa Grâce, au rythme de ses révélations d’Amour.
« Connaître » Dieu, c’est entrer en relation avec Lui, c’est progresser dans son intimité. C’est le travail de toute une vie… Et c’est en progressant dans une intimité plus grande avec Lui, dans une union plus grande avec Lui que je connaîtrai un peu mieux l’intimité qui unit le Père, et le Fils et le Saint Esprit.
La liturgie, et spécialement l’Eucharistie, est le lieu où notre foi peut progresser dans cette intimité avec Dieu, ce lieu où Dieu se donne à entendre, à voir, à goûter. Que cette Eucharistie à laquelle nous participons nous fasse entrer plus avant dans ce mystère d’Amour du Père et du Fils et du Saint Esprit. AMEN.