3e Dimanche de Pâques (A)
30 avril 2020
- Frère Philippe-Marie VAGANAY
Introduction : Bienvenue aux Familles de l’École de Prière et à vous tous qui nous rejoignez par les réseaux sociaux.
« Alléluia ! le Seigneur règne ». Oui, il règne dans les cieux, mais est-ce qu’il règne dans nos cœurs ? Est-ce qu’il règne dans nos états, dans nos législations ?
Eh bien, demandons cette grâce au Seigneur : que son règne s’étende de plus en plus, c’est ce que nous demandons tous les jours dans le Notre Père. Mais pour que le Seigneur règne toujours d’avantage dans nos cœurs, eh bien, nous avons besoin de purifier nos cœurs.
Nous allons recevoir l’eau qui rappelle notre baptême, par laquelle nous demandons au Seigneur de venir purifier nos cœurs, chacune de nos vies.
Homélie : Quelle lecture faire d’un événement ? Quelle lumière nous permettra d’en faire la lecture la plus juste ?
Trois lumières différentes nous permettent de cerner la réalité :
– La lumière du jour nous permet de constater des faits.
– La lumière de l’intelligence nous permet d’appréhender, de comprendre un objet, une situation à partir de notre expérience ou des connaissances que nous avons acquises.
– Mais il ne faut pas oublier ni négliger la lumière Divine qui nous permet d’appréhender le réel à partir de Celui qui est à l’origine de toutes choses et qui les mène à leur fin. Et cette lumière est la plus sûre, car elle est pure vérité.
Ainsi, par exemple, la lumière du jour nous permet à nous, les Frères, de voir, de constater que notre église est vide. Et vous, la lumière du jour vous permet de nous apercevoir de chez vous, derrière votre écran.
La lumière de l’intelligence nous permet de comprendre que c’est un virus particulièrement contagieux qui nous oblige de vivre confinés, chacun calfeutré chez soi.
Mais la lumière divine nous permet de découvrir le sens ultime de ce qui nous arrive : la maladie et la mort sont les conséquences du péché, qui n’est autre chose que de se couper de la source de la vie. Et cet événement que nous vivons en cette période peut nous interroger : Où en sommes-nous ? Où en suis-je dans ma relation à la Vie, avec un grand V ? Où en est ma relation au Vivant ?
L’évangile de ce jour se situe au déclin du premier jour de la semaine.
Tiens ! Au fait ! que c’était-il passé au tout premier jour de la toute première semaine de la longue histoire de notre monde ? Il se passa ceci : « Dieu dit : « Que la lumière soit. » Et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne… Il y eut un soir et il y eut un matin : premier jour. » Genèse 1, 3-5.
C’est au premier jour de la semaine que Dieu crée la lumière, alors que le soleil n’est pas encore créé, comme c’est au premier jour de la semaine que va être allumé dans le cœur des disciples d’Emmaüs, une lumière qui n’est pas de ce monde et que rien ne pourra plus éteindre.
Les deux hommes sont partis de Jérusalem au lendemain des fêtes de la Pâque et du grand shabbat. Leurs cœurs sont lourds : ils ont vu, avec la lumière du jour, tout ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth, ce prophète puissant par ses actes et ses paroles. Il a été l’impuissance même, devant les grands Prêtres et devant Pilate qui l’ont livré à la mort…
Et ils essayent de comprendre à la lumière de leur intelligence : qu’est-ce qui a bien pu se passer ? Pourquoi n’a-t-il rien fait pour se défendre, pour échapper à leurs mains ?
Mais voilà ! La lumière de leur intelligence est insuffisante pour leur permettre de comprendre. Ils sont dans la nuit, on pourrait dire : ils sont KO debout ! Et leur espérance a volé en éclat : « Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël ».
Alors, il faudra qu’une troisième lumière, la lumière divine, se lève dans leur cœur pour qu’ils comprennent qu’il fallait que le Christ souffrit cela pour entrer dans sa gloire et pour nous y introduire, dans cette gloire, à sa suite.
Et comment cette lumière va-t-elle se lever dans leur cœur ? Par la Sainte Ecriture :
L’inconnu qui les a rejoint sur le chemin les fait cheminer dans toute l’Ecriture, en partant de Moïse, c’est-à-dire du livre de la Genèse et de tout le Pentateuque, qui sont les cinq premiers livres de la Bible, et de tous les prophètes, les renvoyant d’un livre à un autre, d’un prophète à un autre, l’un éclairant ce qu’a dit un autre. Alors, peu à peu, le cœur des deux disciples se réchauffe sous l’effet de la foi, de l’espérance et de la charité qui renaissent en eux. La joie les habite à nouveau : ils savent maintenant que c’est bien vrai, ils savent que l’annonce des femmes de leur groupe qui les a remplis de stupeur ce matin n’est pas une catastrophe, c’est une Bonne Nouvelle, une très Bonne Nouvelle : le Christ, leur ami et leur maître, est ressuscité.
Mais voilà qu’ils arrivent à destination : « Reste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse ».
L’inconnu se laisse inviter, prend le pain, prononce la bénédiction, le rompt et le leur donne. Alors leurs yeux de chair s’ouvrent, et ils reconnaissent dans cet inconnu le Ressuscité.
L’itinéraire intérieur des disciples d’Emmaüs, c’est l’itinéraire de tout disciple de Jésus. Jésus ressuscité n’est pas moins présent à nos côtés aujourd’hui, à nous qui sommes confinés, qu’il l’était auprès des disciples d’Emmaüs.
Nos yeux de chair ne suffisent pas à le reconnaître, ni notre seule intelligence. C’est notre foi qui permettra de reconnaître Jésus présent et agissant dans notre vie, dans notre quotidien.
Et qu’est-ce qui fait naître et qui nourrit la foi en nous, sinon la lecture assidue de la Parole de Dieu. Cette épreuve du confinement est, je pense, une grâce offerte pour que nous ouvrions le livre des Ecritures qui reste si souvent fermé. Reprenez les lectures de ce dimanche dans vos grosses Bibles. Et allez voir tous les textes dont les références sont dans les marges. Vous ferez alors la même expérience que les disciples d’Emmaüs : Peu à peu votre cœur va se réchauffer, vous allez goûter la Parole.
Et plus vous fréquenterez Jésus dans les Ecritures, plus vous le reconnaîtrez présent et vivant dans votre vie et dans l’Eucharistie.
Vous aurez reconnu dans l’évangile de ce jour les deux grandes parties de la messe : la liturgie de la Parole, Jésus qui explique la Parole de Dieu, qui fait vivre aux disciples tout un chemin dans l’Ecriture et, avec la fraction du pain, la liturgie de l’Eucharistie.
Cette reconnaissance de Jésus remet les disciples en route. Ils repartent à Jérusalem et annoncent ce qu’ils ont vécu. L’Eucharistie, fruit de la foi, fait de nous des témoins, des gens qui parlent, qui annoncent.
A Jérusalem, ils retrouvent la communauté et, là encore, c’est dans les versets qui suivent immédiatement notre évangile, ils y verront Jésus présent.
Jésus ressuscité est présent et agissant dans la Parole, dans l’Eucharistie et dans la Communauté réunie en son nom.
Que ce temps de confinement creuse en nous le désir de voir Jésus ressuscité. Qu’il creuse en nous le désir de le fréquenter aux pages de l’Ecriture, pour qu’un jour nous tous ayons la joie de le retrouver présent dans la Communauté chrétienne réunie en son nom, et dans son Eucharistie célébrée tous ensemble. Amen.