4e DIMANCHE DE CARÊME (A) 2023

19 mars 2023

  • Frère Philippe-Marie VAGANAY Frère Philippe-Marie VAGANAY

INTRODUCTION : Frère Philippe-Marie

Nous souhaitons la bienvenue aux enfants qui préparent leur Profession de Foi de la paroisse St Jean-Paul II de Betton, accompagnés par le Père Guillaume Camillerapp. Bienvenue aussi à l’Equipe Notre-Dame, du Mans, et bienvenue à vous tous. Nous souhaitons une bonne fête à tous ceux qui sont sous le patronage de St Joseph. Et nous serons en communion avec tous les pèlerins qui, en ce moment même, se sont rendus au sanctuaire de St Joseph des Champs, près de Laval.

Ce dimanche nous invite à la joie. Le Carême, c’est comme un grand pèlerinage. Et bien souvent dans les grands pèlerinages, il y a le Mont de la Joie. Quand on arrive sur un promontoire, on voit le lieu du pèlerinage, c’est un moment de joie. Et ces lieux s’appellent très souvent le Mont Joie. Voilà, aujourd’hui, nous sommes invités à la joie, parce que nous sommes à la moitié de notre chemin du Carême. Et nous voyons déjà la lumière de Pâques qui brille, notamment dans les yeux de cet aveugle qui est guéri par Jésus. Alors, nous aussi, laissons-nous envahir déjà par cette lumière de Pâques, et c’est par la foi que nous accueillons justement la lumière du Ressuscité.

Alors au seuil de célébrer ce mystère de l’Eucharistie, reconnaissons nos manques de foi, peut-être nos lassitudes, nos découragements, nos manques d’espérance. Reconnaissons que nous avons péché, et laissons-nous recouvrir par la Miséricorde du Seigneur.

 

HOMELIE : Frère Philippe-Marie

Nous voici arrivés à la mi-carême. Nous sommes donc à mi-parcours de notre chemin vers Pâques. Et il est bon de faire un point d’étape, pour voir d’où nous sommes partis et où nous allons.

Il est bon aussi de nous rappeler que le Carême est ce temps où nous accompagnons, par notre prière et par nos sacrifices, les catéchumènes qui découvrent, progressivement, qui est Jésus et le contenu de notre foi chrétienne. Je vous propose pour cela de survoler les premières lectures et les Évangiles de ce Carême, pour voir où nous en sommes.

Nous avons d’abord entendu le récit de la chute originelle qui a mis devant nos yeux le drame qu’a connu notre humanité qui n’a pas su résister à la tentation et qui, par conséquent, a perdu la familiarité et l’amitié avec Dieu. Dans ce contexte, le deuxième dimanche nous a rappelé la fidélité de Dieu qui ne se lasse pas, qui choisit Abraham pour en faire la souche d’une humanité nouvelle. Dimanche dernier, nous avons vu que la mise en œuvre du salut par la libération d’Égypte n’excluait pas les épreuves. L’épreuve de la soif a été l’occasion de récriminations contre Dieu.

Dans la première lecture d’aujourd’hui, l’œuvre de Dieu se poursuit. Dieu veut faire de son peuple un royaume, le Royaume de Dieu. Pour cela il se choisit un roi, selon son cœur, le jeune David, mais le choix de Dieu ne correspond pas avec nos critères. La Vierge Marie chantera un jour la sagesse de Dieu qui renverse les puissants et qui élève les humbles.

Dimanche prochain, l’œuvre de Dieu se poursuivra par une promesse de résurrection du peuple parti en exil : « Je vous ferai sortir de vos tombeaux. Je mettrai en vous mon Esprit. » Et le dimanche des Rameaux nous présentera ce serviteur qui se laisse ouvrir l’oreille pour obéir, et qui ne se révoltera pas, qui ne se dérobera pas. Le chemin du Carême est donc un chemin qui part de la désobéissance et de la mort, pour arriver à l’obéissance, à la vie et à la résurrection, dans l’obéissance du Christ serviteur.

Tout au long de ce Carême, les Évangiles ont encore montré aux catéchumènes qui est Jésus. Par la tentation, au désert, Jésus nous est montré comme étant un vrai homme. Il a connu la tentation, tout comme nous, hormis le péché. Dans l’Évangile de la Transfiguration, Jésus nous est montré comme vrai Dieu. Il apparait aux yeux des trois disciples privilégiés, dans toute la gloire de sa divinité, et le Père et l’Esprit Saint se manifestent eux aussi dans leur puissance de Gloire. Jésus est donc vrai Dieu et vrai homme.

Avec l’Évangile de la samaritaine, dimanche dernier, Jésus se présente comme celui qui, seul, peut combler la soif de notre cœur. On a tous soif d’amour, et seul Jésus peut combler notre soif d’amour. Aujourd’hui, par l’Évangile de l’aveugle de naissance, Jésus nous est présenté comme l’envoyé qui illumine notre chemin de foi. Le Baptême sera appelé par les premiers chrétiens le Sacrement de l’Illumination.

Dimanche prochain, le récit de la résurrection de Lazare montrera que Jésus est notre vie et notre résurrection. Et le dimanche des Rameaux mettra sous nos yeux Jésus qui livre sa vie pour que nous soyons sauvés. Alors la question nous est posée, comme elle est posée aux catéchumènes : Voulons-nous croire ? Voulons-nous mettre notre confiance en ce Jésus ?

L’Évangile d’aujourd’hui pose en effet la question de la foi en Jésus. Pourquoi croire en Jésus ? Parce que Jésus est l’envoyé, nous dit l’Évangile. Mais envoyé par qui ? Jésus demande à l’aveugle de naissance d’aller se laver les yeux à la piscine de Siloé, donc à la piscine de l’envoyé, puisque Siloé veut dire en hébreu « envoyé ». L’aveugle est donc appelé à se laver à la piscine de Jésus, l’envoyé.

Et cette piscine de Jésus c’est quoi ? C’est le Baptême, le Baptême qui lave et qui illumine. A peine l’aveugle est-il guéri, que Jésus apparemment sort de la scène. On ne le voit plus, mais c’est de lui qu’il va être question, au long d’un étrange procès par contumace, où plusieurs types de personnes sont appelés à la barre.

Il y a d’abord les voisins et les connaissances qui manifestent une curiosité sympathique, mais qui ne vont pas plus loin : « Oui, c’est bien lui, effectivement, on le reconnait. » Et d’autres : « Non, c’est quelqu’un qui lui ressemble. » Et on ne va pas chercher plus loin. Il y a ensuite les parents de l’aveugle, qui eux, prennent le parti de la dérobade. Que ne ferait-on pas pour ne pas avoir d’histoires ? Ils ne veulent pas se mouiller.

Puis, il y a les pharisiens qui sont divisés au sujet de l’homme guéri, divisés entre eux. Et puis, dans un deuxième temps, ils manifestent leur suffisance. Ils savent, eux. Ils savent que Jésus est un pécheur. Ils savent que Dieu a parlé à Moïse, mais ils ne veulent pas savoir d’où vient Jésus. Or, c’est la vraie question ! Ils ne veulent pas savoir d’où vient Jésus. Ce faisant, ils commettent le péché du refus de la foi. Ils choisissent d’être volontairement incroyant en se bouchant les yeux sur le mystère de Jésus.

Et puis enfin, il y a cet aveugle guéri. D’abord, il sait simplement que cet homme qui l’a guéri, on l’appelle Jésus. Puis, devant ce signe dont il a été le bénéficiaire, il dit de Jésus : « C’est un prophète. » Il progresse. Dans sa controverse avec les pharisiens, il sait que Dieu n’exauce pas les pécheurs ; donc Jésus n’est pas un pécheur. Alors que les pharisiens se sont enfermés dans leur incroyance, l’aveugle lui n’a cessé d’avancer dans la foi.

Mais cette foi ne va atteindre son sommet que sur l’initiative de Jésus, dans la rencontre personnelle avec Jésus. Ce n’est plus sur ce qu’on dit de Jésus, mais c’est dans la rencontre avec Jésus. Quand il rencontre Jésus, il dit : « Je crois, Seigneur ! » Et il se prosterna devant lui.

Par ce mot, « Seigneur », et par son prosternement, il confesse la divinité de Jésus. Il croit que Jésus est l’envoyé de Dieu. La vraie profession de foi ne se fait que dans la rencontre personnelle avec Jésus. Alors la question nous est posée : Est-ce que je rencontre personnellement Jésus ? Ou est-ce que, comme les voisins, comme les parents, comme les pharisiens, j’évite de rencontrer Jésus ? Est-ce que je choisis de rencontrer Jésus ? Et vous savez que c’est par la prière, dans la Parole de Dieu que l’on rencontre Jésus qui va pouvoir parler à notre cœur.

Cet étrange procès se termine par un jugement, comme tous les procès. Et ce qu’il y a de curieux, c’est que c’est Jésus qui pose le jugement. Et ce jugement le voici : le péché ne se situe pas où les pharisiens le pensaient, dans l’observation ou non du Sabbat ; le péché se situe dans le refus de voir et de croire. Autrement dit, les pharisiens se condamnent eux-mêmes en refusant de croire. Ce qui veut dire qu’en choisissant de rencontrer Jésus et de croire, nous permettons à sa lumière de nous envahir, sa lumière de ressuscité. Alors, dans le Seigneur, nous sommes lumière, et nous nous conduisons en enfants de lumière, comme nous l’a dit St Paul.

Que ce chemin de Carême qui nous reste à parcourir, soit précisément une marche vers la lumière, que nous dirigions toujours plus vers cette lumière. Afin que, oui, nous devenions vraiment lumière dans le Christ ressuscité, et que nous soyons alors des témoins de l’espérance pour tous ceux qui marchent dans la nuit de ce monde.

AMEN