6ème Dimanche du Temps Ordinaire (B)
14 février 2021
- Frère Omer COULIBALY
Introduction : En ce 6ème dimanche du temps ordinaire, nous sommes heureux d’accueillir, en notre prieuré, les cheftaines en formation, les jeannettes avec la(es) cheftaine(s) qui les accompagne(nt), la famille Guerrier qui aujourd’hui remet encore dans le cœur de Dieu leur fils-frère, Pierre.
Le Seigneur nous convoque et nous rassemble pour nous communiquer son Esprit-Saint, commençons par recevoir son pardon et sa miséricorde.
Homélie : Frères et Sœurs, est-ce que vous allez bien ? Oui ? Vous savez : on a été un peu secoué par une vague de froid ces temps-ci, donc on aimerait que les distanciations soient retirées pour qu’on puisse se rapprocher et avoir de la chaleur, mais plus la chaleur humaine.
Comment ne pas faire un rapprochement entre la 1ère lecture et l’évangile et la situation sanitaire que nous traversons ? Est-ce que vous m’entendez bien ? Pas trop, moyen, donc je vais augmenter le volume. C’est très important, c’est frustrant quand on parle et puis on se rend compte qu’on ne nous entend pas ; on dit : c’est sûrement, ça devait être beau ce qu’il dit mais on a rien entendu et c’est frustrant. Voilà, je disais : comment ne pas faire le rapprochement entre la 1ère lecture, l’évangile et la situation sanitaire que nous traversons ?
Dans la première lecture que nous venons d’entendre, on nous donne les conditions, ce qui était réservé à un lépreux : quand il remarque sur son corps une tache, il va trouver le prêtre. Aujourd’hui, quand on commence à avoir des symptômes, la perte de goût et autre, on ne va pas voir le prêtre mais on va voir le test covid. Et après qu’est-ce qui s’ensuit. Le prêtre dit : bon, écoute, tu vas te mettre à l’écart ; aujourd’hui, c’est le confinement, on a rien inventé, ça existait déjà, donc c’est pas nouveau. Et la personne, en fait, perd sa dignité humaine, quelque part, puisqu’elle est à l’écart, en fait elle n’a plus d’identité. Pour nous, la personne est confinée dans sa maison, on ne la voit plus, quelque part elle perd sa dignité et son identité aussi.
Et Jésus nous donne la réponse dans l’évangile, qu’est-ce que lui, Jésus, fait ? En fait, à quoi il nous invite ? Ce dossier n’est pas nouveau pour nous puisque, avec la crise sanitaire, on a vu tous les dévouements des personnes, même des personnes qui ont perdu la vie. Alors qu’est-ce qui animait ces personnes ? Et Jésus nous donne une réponse. On nous dit : Jésus tend la main et touche le lépreux. Bien sûr, la question de « toucher », dans le contexte assez récent, fait dresser les cheveux sur la tête, et puis peut-être on a un froid dans le dos.
Mais Jésus quand il touche ce n’est pas pour posséder, c’est pour se donner, se livrer. Jésus quand il touche ce n’est pas pour détruire la vie, mais c’est pour construire la vie. Jésus quand il touche ce n’est pas pour se servir, mais il se met au service des autres. Et si Jésus se met au service des autres, il porte sur lui, il redonne à l’être humain toute sa dignité. Et nous avons remarqué, avec la situation sanitaire, il y a des personnes, des prêtres, des religieuses, des laïcs, des personnes de bonne volonté qui se sont mis spontanément au service de nos Frères et Sœurs atteints de ce virus.
A taille humaine, on pourrait dire : c’est de l’imprudence ; mais lorsque nous nous tenons sous le regard de la grâce, moi je dirai plutôt, c’est la foi, la foi en Dieu et la foi en l’homme qui nous permet d’aller vers l’autre et tout simplement de se mettre au service de l’autre parfois au péril de la vie. C’est l’occasion pour nous, d’ailleurs, de prier pour toutes ces personnes qui sont décédées suite à ce virus. Non seulement c’est la foi mais aussi, je dirai, c’est de l’ordre de la grâce où nous voyons folie, c’est une folie d’y aller, devant la grâce de Dieu nous pourrons nous dire, c’est la grâce qui les conduit et cette grâce qui donne la vie quelque part en allant vers l’autre. Nous pouvons voir, percevoir peut-être du gâchis, on dit : c’est du gâchis, ils ont gâché leur vie. On pourrait peut-être voir la fécondité puisque il y a des âmes qui ont été sauvées.
Revenons à Jésus qui touche le lépreux, qui lui dit : « N’y va pas » à l’encontre de la loi. Bien au contraire, il lui dit : « Va trouver le prêtre et donne ce qui est prescrit, quand on est atteint de la lèpre ». Imaginons un instant que le Seigneur nous dit : « Aujourd’hui, avec ce que nous traversons, fais-moi confiance et prends le temps de te soigner ou de te protéger ou de protéger les autres, ce n’est pas aller à l’encontre de ma liberté », petit point d’attention.
Et Jésus, qu’est-ce qui se passe pour Jésus ? Finalement, c’est Jésus qui devient le lépreux, en fait, puisque à la fin, Jésus ne pouvait pas entrer dans la ville, il était à l’écart comme les lépreux. Quelque part, humainement, on dira, il perd sa dignité, il perd son identité en se mettant à l’écart.
Mais qu’est-ce qui se passe à l’écart ? C’est ce qui est très intéressant, « de partout cependant, tous venaient à lui ». Là où est le désert, là où est l’impossible, Dieu rend toutes choses possibles. Est-ce que nous avons foi en cela ? Là où est l’impossible, Dieu met le possible. C’est une question : est-ce que vous avez foi en cela ?… Ah ! C’est très important de faire confiance et d’avoir foi en Dieu, il ne nous abandonnera jamais, quelques soient les difficultés que nous pourrons traverser de manière humaine, Dieu qui est l’auteur de la vie continue à insuffler en nous son souffle de vie. La preuve, Jésus, qu’est-ce qui s’est passé pour lui un peu plus loin ? Jésus est allé jusqu’à mourir sur la croix, à l’écart de la ville, comme une personne atteinte de la lèpre, comme une personne qui n’était plus désirée de la société. Mais là-haut sur la croix, Jésus nous apporte la vie, et c’est l’essentiel de notre vie chrétienne.
Quant à Saint Paul, dans la situation dans laquelle il est, c’est bien de se remettre un peu dans le contexte, il adresse une lettre dans la communauté de Corinthe. Là-bas, qu’est-ce qui se passe ? Première chose, ce que, ben, on se pose des questions, « est-ce qu’il faut manger la viande qui est sacrifiée aux idoles ou pas » ? C’est un gros problème. Deuxième souci qui arrive, c’est que, ben, quand il y a des disputes entre les chrétiens, ils vont pas forcément s’adresser à la communauté chrétienne, ils vont s’adresser à d’autres personnes qui sont en dehors de la communauté chrétienne, et Saint Paul il leur dit : attention, c’est pas bien ça. Et troisième réalité, c’est que les chrétiens quand ils se réunissent pour célébrer l’Eucharistie, ça se transforme en gueuleton, comme les jeunes aiment le dire. On fait une grande bouffe, et puis on est content parce que notre ventre, la peau de notre ventre est bien tendue, et puis, on se soucie de rien.
Saint Paul leur dit : « attention, il y a beaucoup de désordres, il y a une perte de repère », vous voyez ce que je veux dire ? Avec toutes les informations que nous avons, un coup c’est à droite, un autre coup c’est à gauche, un coup c’est devant, un coup c’est derrière, il y a une perte de repère et s’instaure en nous la méfiance de l’autre, or l’Autre, avec un grand A, Dieu qui est en nous, il vient en nous avec confiance. Saint Paul dit aux habitants de Corinthe : quel est votre repère ? Si c’est le Christ, imitez-le comme moi j’imite le Christ, en fait, imitez-moi, en m’imitant, vous imitez le Christ. Saint Paul nous dit, là où peut être l’autorité, la maternité, la paternité a été ballottée, collée à gauche et à droite, il n’y a plus de vie. Il faut tenir compte de cette paternité qui vient de Dieu, de cette autorité qui vient de Dieu, et qui nous permet à nous, non seulement de nous rassurer dans notre condition d’enfant de Dieu, mais aussi de grandir dans la liberté au service des uns et des autres.
Demandons au Seigneur, au cours de notre célébration eucharistique, de nous accorder la grâce d’avoir toujours confiance en lui, de nous accorder la grâce de nous séparer de la méfiance de l’autre qui fait qu’on ne peut même plus aujourd’hui vivre un bon moment ensemble de peur de contracter le virus. Demandons au Seigneur de nous donner la force d’être des chrétiens debout et qui est tout simplement la joie de vivre en enfants de Dieu. Amen.