28e DIMANCHE du Temps Ordinaire C 12 octobre 2025
12 octobre 2025
-
Frère Jean François CROIZÉ
Intégralité de la Messe sur Youtube
Accueil
Nous sommes le 28ème dimanche du temps ordinaire de cette année C. C’est aujourd’hui, au jour d’aujourd’hui que l’on commence la prière pour l’unité des chrétiens, c’est la semaine missionnaire, excusez-moi. C’est aussi la fête de Carlo Acutis que l’on célèbre le jour de sa mort, de son entrée au Ciel, et c’est aujourd’hui. Hé bien, prions-le ce jeune missionnaire de l’Eucharistie, afin de nous stimuler à vivre ce temps de communion avec le Seigneur en reconnaissant que nous avons besoin de salut, de guérison.
Hé bien, entrons dans la célébration du mystère de l’Eucharistie en reconnaissant que nous avons péché.
Homélie
Chers frères et sœurs, d’abord je voudrais souhaiter la bienvenue aux membres du groupe « Alpha » de Châteaubriant et puis aux parents de religieuses, religieux et prêtres qui se rassemblent aujourd’hui.
Dimanche dernier, peut-être vous en souvenez vous, le Seigneur attirait notre attention sur la foi :
- « Si vous aviez la foi gros comme une graine de moutarde, vous diriez à cet arbre, déracine-toi et va te planter dans la mer, et il vous obéirait. »
Aujourd’hui, le Seigneur nous parle d’une dimension de la foi ou, si vous préférez, d’une conséquence de la foi, la guérison et le salut. Dans la première lecture, il est question de Naaman, un officier de l’armée syrienne, donc un étranger, qui vient en terre d’Israël pour se faire guérir de la lèpre par Élisée, le prophète de Dieu. Naaman, quel est donc cet homme, pour bien comprendre sa volonté de guérison ? Parlons-en si vous voulez.
Naaman, comme on l’a entendu était un officier syrien de l’armée syrienne, le général en chef, le 2ème personnage d’un royaume, le royaume de Syrie de Damas, or, à cette époque le général en chef était le 2ème personnage du royaume, car tout royaume pour subsister le devait à la puissance de son armée. Naaman, non seulement était général en chef d’une armée mais, il avait aussi une armée d’esclaves à son service. Or ce général avait gagné une guerre contre Israël, et tendu bien des embuscades. Or ce personnage avait un problème c’est qu’il était lépreux, il était couvert de boutons. Or, quand on occupe une telle place on a besoin d’offrir une façade lisse parce qu’il faut faire des présentations, il y a des banquets, il y a des réceptions, et donc il a tout essayer pour guérir, chirurgiens, médecins, devins, guérisseurs, tout ce qu’on veut. Rien n’y a fait.
Or, pour l’anniversaire de sa femme croyez-vous cet homme immensément riche qu’il aurait pris sur sa fortune ? Pas du tout, il a tendu une embuscade en Israël, il a enlevé une petite fille et il l’a offerte en cadeau à sa femme, vous voyez le personnage… Or cette petite fille avait bien remarqué que son maître était lépreux et elle n’arrêtait pas de dire à sa maîtresse :
- « Ah si mon maître savait, il y a un grand prophète en Israël, sûrement qu’il le guérirait. »
Mais, un général en chef n’écoute pas une esclave. Finalement, il a entendu sa femme, il est allé trouver le roi de Damas pour lui dire, mon service de renseignements m’a dit qu’il y a un super guérisseur en Israël. Et le roi de Damas est bien ennuyé, « nous sommes en guerre ». La nuit portant conseil, le lendemain il lui a dit : « Je t’envoie comme ambassadeur auprès du roi d’Israël et il dit, on va faire une belle lettre ». Et donc dans la lettre est écrit un certain nombre de propositions dont, celle-là, la guérison de Naaman.
Et lorsque Naaman, avec des conseillers et une fortune colossale s’est présenté devant le roi de Jérusalem, le roi de Jérusalem l’a reçu comme un ambassadeur. Mais il n’était pas dupe, il savait que c’était son pire ennemi, et lorsque Naaman a présenté ses lettres de créance, et que le roi a lu toutes ces propositions pour lire à la fin : « Je t’envoie Naaman pour que tu le guérisses », il s’est dit que c’est un piège, ils veulent la guerre. Alors, il a déchiré ses vêtements, ça veut dire « rupture diplomatique », et Naaman s’est trouvé humilié, un échec considérable dans sa mission d’ambassadeur, lui qui n’a jamais connu d’échecs.
Sur le chemin du retour Élisée, ce grand prophète d’Israël, envoie un de ses serviteurs pour trouver Naaman, pour lui dire :
- « Viens donc me voir tu sauras qu’il y a un prophète en Israël. »
Quand ce serviteur rencontre les conseillers de Naaman et fait la commission, à ce moment-là, ils comprennent qu’effectivement le grand prêtre, ce n’est pas le roi, le grand prophète, c’est, justement, Élisée. Et c’est comme ça que Naaman se présente devant la maison d’Élisée en pensant qu’il va sortir, il va faire ses incantations et je serai guéri. Pas du tout. Élisée reste au fond de sa cuisine, envoie un serviteur pour lui dire :
- « Va donc te plonger sept fois dans le Jourdain et tu seras guéri. »
Or, quand Naaman reçoit un ordre d’un esclave étranger sans le recevoir, ni sans le voir, il devient rouge de colère, rouge d’une violence inouïe. Si cet esclave était syrien, il l’aurait tué, et c’est comme ça qu’il fait demi-tour. Ses conseillers qui avaient l’étoffe humaine, la sagesse, attendent que la colère refroidisse pour ne pas mettre de l’huile sur le feu, et lorsque la colère retombe, ils s’approchent de Naaman et s’adressent à son humanité en lui disant :
- « Père, si le prophète avait demandé quelque chose de compliqué », et là ils vont s’adresser à sa bravoure, « nous, nous savons que toi tu l’aurais fait, à combien plus forte raison que c’est si simple. »
Et comme Naaman était intelligent il écoute ses conseillers et il va dans le Jourdain et là, avant de faire cette démarche, Élisée veut lui faire comprendre trois choses :
- La façon dont toi tu traites tes esclaves, moi je te traite, c’est-à-dire, accueille ces esclaves aussi comme des messagers.
- Deuxièmement, ta lèpre c’est l’orgueil qui pourrit ton cœur.
- Troisièmement, si tu veux guérir tu n’as qu’à poser un acte d’humilité.
L’humiliation, à la hauteur de son orgueil. Et c’est ainsi que se présentant devant le Jourdain, qu’il considérait comme une eau boueuse, il va accepter de se montrer tel qu’il est, de la tête aux pieds, lépreux. Il va se déshabiller, il va se plonger sept fois. Et à la septième fois qu’est-ce qu’il se passe ? C’est qu’il accepte de briser ce cœur d’orgueil pour laisser transpirer son cœur d’enfant qui va transpirer jusqu’à sa chair, et c’est là qu’il est guéri.
Guéri, il fait demi-tour, il revient voir le prophète et Élisée l’attend sur le pas de la porte et ce n’est pas un général en chef ni un ambassadeur qui se présente c’est un homme qui rencontre un autre homme, pour reconnaître justement dans cette humanité la grâce qu’il vient de recevoir, et il veut donner sa fortune. Élisée lui dit :
- « Non, les dons de Dieu sont des dons gratuits que Dieu donne. Il faut simplement un cœur capable de les recevoir. »
Voilà, pour ce général en chef qui devient simplement un serviteur, un serviteur qui précisément va se remettre à un Dieu qu’il ne connait pas, étranger, et reconnaître sa puissance et sa grâce.
Dans l’Évangile nous voyons dix lépreux guéris, guéris parce qu’ils ont cru. Les dix ont cru et donc ont été guéris par leur foi seulement, un seul a pensé à revenir pour rendre grâce…. Comme Naaman, c’est un étranger à Israël, il est Samaritain. On imagine sans peine l’intensité de la rencontre entre Jésus et des lépreux, ces exclus de la cité de Jérusalem, c’était ainsi, la loi lui ordonnait, alors que Jésus monte vers Jérusalem, mais c’était au dehors de la ville qu’on le conduira un jour pour Le crucifier là où demeurent les lépreux. Sur la croix, Jésus rejoindra tous ces condamnés, tous ces rejetés, tous ceux qu’on ne veut pas voir, et le salut passe par ce lieu de la croix délaissé, hors de la ville. Ces lépreux coupés du reste des hommes, et de ce fait condamnés, ce sont des morts vivants, sont en fait les plus proches du salut. Leurs cris rejoignent Jésus qui Lui-même entendra un jour vociférer :
- « Crucifie –Le, crucifie-Le. »
E ces lépreux crient :
- « Jésus, Maître, fais-nous grâce, fais-nous miséricorde. »
C’est complètement l’inverse. Une telle prière ne se dit qu’à Dieu. Dans leur misère ils se reconnaissent comme rejoints par Dieu lui-même. Jésus leur répond :
- « Allez vous montrer aux prêtres. »
Du dehors de la cité, Jésus les pousse à entrer dans Jérusalem dans son centre symbolique qu’est le temple. Le temple est le lieu où l’homme est réintroduit dans la communion alors qu’il en avait été écarté. Les lépreux sont invités à se montrer aux prêtres du temple, à mettre fin à leur exil qui les coupait du temple, de Dieu et de leurs frères. Et en chemin ils sont guéris, cependant, l’un d’eux revient sur ses pas. Son retour d’exil est un retour vers Jésus, un retour vers le seul prêtre qui soit et vers son corps qui est le vrai temple, mais en même temps qu’il revient vers Jésus, il revient aussi vers lui-même, vers le temple de son cœur, de son âme. La lèpre le maintenait comme en exil de lui-même, en exil de son être profond, on ne voyait de lui qu’un impur, un homme à fuir. Jusqu’à maintenant, il ne faisait qu’exister, désormais, il désire être, en vérité, ce qu’il est, son retour vers son être, vers son identité véritable se fait parallèlement à son retour vers Jésus. C’est cela la conversion. Seul Jésus nous conduit à la vérité de nous-mêmes :
- « Il est le chemin, la vérité, la vie », nous dit St Jean.
Désormais, le lépreux guéri rend grâce, c’est le sens de l’Eucharistie, et Jésus lui dit :
- « Relèves-toi », c’est-à-dire ressuscite, « ta foi t’a sauvé ».
Et le lépreux passe de la guérison physique au salut qui relève par l’action de grâce, l’Eucharistie. Regardez le chemin de cet homme, il était crucifié par sa chair lépreuse et exclu, de la croix il va au temple et plus encore au temple véritable, le Christ. Guéri, il est ensuite relevé, sauvé, en s’unissant dans cette Eucharistie, dans l’action de grâce à la Pâque du Christ, la croix, le temple, l’Eucharistie.
Et regardons maintenant le chemin de Jésus qui, de l’extérieur de la ville monte au temple de Jérusalem, mais, il en sera exclu et rejeté par le grand prêtre et les siens. Il sera jeté dehors, hors de la ville, pour être cloué sur la croix, prenant sur lui la lèpre de nos péchés, le temple, la croix, l’offrande dans l’Eucharistie. Les routes de ce Samaritain et de Jésus se sont croisées, une rencontre qui a été échange de vie, le lépreux s’est déchargé de sa croix sur Jésus et Celui-ci a donné sa vie à celui-là. Le lépreux s’ouvre à la vie, Jésus consent à la mort. Le lépreux découvre la communion avec ses frères, Jésus meurt abandonné de tous. Le lépreux a saisi que Jésus ne lui avait pas fait un don mais, le don premier, source de tous les autres, le don de Lui-même. Et la croisée de ces deux routes, de ces deux destinées, a son sommet, dans, l’action de grâce dans, l’Eucharistie. C’est là, dans l’Eucharistie, que le lépreux de retour d’exil trouve le salut.
Et nous, nous venons avec nos croix, nos infirmités, notre lèpre que nous déposons sur les épaules de Jésus et dans son cœur, et Lui nous offre sa vie. Notre retour d’exil, notre conversion est toujours à reprendre, mais nous savons qu’au cœur de chaque Eucharistie notre vie se greffe à celle du Christ, le salut nous est donné, et Jésus actualise le don de sa vie sur la croix et nous, nous passons de la mort à la vie. Que notre action de grâce soit vraie, laissons-la déborder par la louange.
Ces deux récits, celui concernant Naaman le Syrien, celui du lépreux guéri de l’Évangile, peuvent nous servir aussi de bonne occasion pour nous interroger sur notre attitude. Chacun de nous est Naaman et chacun de nous est l’un des lépreux guéri par Jésus. Sommes-nous celui qui est revenu rendre grâce ou l’un des neuf autres ?
Si nous avons un peu de connaissance de nous-mêmes, nous savons que nous sommes tous des êtres blessés. Celles-ci peuvent être superficielles comme elles peuvent être profondes, elles peuvent être de caractère physique, psychologique, spirituel, et en plus de tout cela nous avons, évidemment, les blessures de nos péchés. Jésus nous offre la guérison et le salut. En réalité nous n’avons pas à attendre qu’Il vienne accomplir en nous un miracle, car nous avons tous en nous-mêmes une force capable de guérir. Ce pouvoir de guérison que nous portons en nous c’est le Christ qui habite en nos cœurs.
Ce pouvoir de guérison a besoin d’être libéré, activé, et il l’est par la foi, or la foi est produite lorsque, lors d’une rencontre personnelle avec le Christ Lui-même ou parfois avec un messager du Christ, un prophète. Non seulement nous devons être attentifs à reconnaître les messagers que Jésus nous envoie, mais nous sommes tous appelés à être les uns pour les autres un prophète comme Élisée le fut pour Naaman, et donc appelés à être source de foi et de guérison les uns pour les autres. En réalité, cette grâce de guérison arrive si souvent dans nos vies que nous n’y portons pas souvent attention. Comme les neuf lépreux de l’Évangile, nous oublions la plupart du temps de revenir dire merci et d’offrir à Dieu notre louange et notre adoration.
Alors, au cours de cette Eucharistie rendons grâce à Dieu de s’être fait en Jésus le médecin de tous nos maux et blessures, de nous avoir délivrés de nos péchés, et le salut, dans ce cas, consistait à pouvoir dire merci. La gratitude n’est pas une qualité si bien répandue, c’est la prévenance de l’amour. Dire merci, tout simplement, c’est pour cela qu’on appelle Eucharistie, c’est-à-dire action de grâce, que nous célébrons tous ensemble, particulièrement, en ce moment. Le Seigneur nous donne la vie, nous donne son amour sans compter avec son corps et son sang.
AMEN